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Cessons de banaliser la prostitution! C’est de l’exploitation!

Pour diffusion immédiate
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Québec, le 31 mai 2012 — Le Conseil du statut de la femme croit qu’il est urgent d’agir pour contrer la prostitution, une forme d’exploitation sexuelle inacceptable dans une société comme le Québec qui a fait de l’égalité entre les sexes une valeur fondamentale. Dans un avis fouillé paru aujourd’hui, le Conseil recommande au gouvernement du Québec de freiner la demande pour des services sexuels en organisant une vaste campagne de sensibilisation auprès des clients, afin que le recours aux personnes prostituées ne soit plus considéré comme un acte banal et sans conséquence.

Selon la présidente du Conseil, Julie Miville-Dechêne, « il est temps d’arrêter de criminaliser les personnes prostituées, et de mettre en lumière le fait que les clients et les proxénètes sont ceux qui profitent de cette exploitation sexuelle, souvent en toute impunité. » Le Conseil recommande que le Québec suive l’exemple de la Suède, de la Norvège et de l’Islande, où la criminalisation de l’achat de services sexuels, combinée à des campagnes pour changer les mentalités et à des services spécialisés pour aider les femmes à quitter le milieu de la prostitution, ont porté fruit. En Suède notamment, la prostitution de rue a diminué de moitié. Inversement, dans tous les pays où la prostitution a été légalisée, que ce soit l’Australie, les Pays-Bas, ou l’Allemagne, la traite humaine et le nombre de prostituées ont augmenté. Un marché clandestin s’est développé dans ces pays, car les éléments criminels qui contrôlent le commerce de la prostitution ne veulent pas payer d’impôts et faire face à des contrôles sanitaires.

« La prostitution est un enjeu complexe et difficile. Nous reconnaissons d’emblée que certaines femmes peuvent tirer profit de ce commerce lucratif », explique Julie MivilleDechêne. Néanmoins, tous les faits démontrent qu’une grande majorité des femmes se retrouvent dans des situations de violence qu’elles n’ont pas choisies, et dont elles peuvent difficilement se libérer sans aide extérieure. Les jugements ontariens l’ont confirmé : celles qui se sont baptisées « les travailleuses du sexe » admettent qu’elles ne parlent qu’au nom de 5 à 20 pour cent des personnes prostituées. « Il est essentiel donc de se préoccuper de toutes les autres, celles pour qui cette idée de choix ou de consentement est un leurre »

Julie Miville-Dechêne


Le Conseil du statut de la femme estime que le rôle de l’État est de veiller à la protection des membres les plus vulnérables de la société, d’autant plus que la prévention de l’exploitation sexuelle fait partie du plan d’action du gouvernement du Québec pour l’égalité entre les hommes et les femmes.

L’avis du Conseil intitulé La prostitution : il est temps d’agir fait état des recherches les plus récentes à travers le monde; il présente des témoignages de femmes ayant vécu dans le milieu de la prostitution, d’intervenantes sociales et d’agents de police; il relate les points de vue des principaux groupes de pression au Québec; il démontre que les préjudices découlant de la prostitution portent atteinte à la dignité des femmes; et il se termine par onze recommandations parfaitement ancrées dans la réalité à l’attention du gouvernement du Québec.

Le Conseil demande au Québec de faire pression sur le gouvernement fédéral pour décriminaliser les personnes victimes de la prostitution, mais continuer à punir les clients et les proxénètes. Au plan social, il réclame des services spécialisés pour aider les personnes prostituées et les victimes de la traite à quitter ce milieu. « Des mesures de prévention sont nécessaires pour empêcher les jeunes filles de tomber entre les griffes de proxénètes. Nous croyons qu’il faut avant tout changer les mentalités, arrêter de banaliser la prostitution, et cesser de croire que c’est une fatalité », conclut la présidente du Conseil.

Non, la prostitution n’est pas le plus vieux métier du monde! C’est pourquoi une vaste campagne d’information devrait être menée au Québec afin de décourager les clients d’acheter des services sexuels en montrant les nombreux préjudices qui découlent de la prostitution.

L’avis La prostitution : il est temps d’agir ainsi que le résumé, sont accessibles en ligne à l’adresse suivante : www.placealegalite.gouv.qc.ca.


Annexe 1 – Quelques estimations

Liens entre prostitution, violence, traite, gangs de rue et crime organisé

  • Impossible de parler de la prostitution sans parler de la traite des êtres humains qui alimente ce marché.
  • De nombreuses études démontrent que la violence est la norme dans la prostitution.

À travers le monde :

  • De 40 à 42 millions de personnes se prostitueraient.
  • 80 % d’entre elles sont des femmes ou des filles.
  • Les ¾ seraient âgées de 13 à 25 ans.
  • 9 personnes sur 10 seraient dépendantes d’un proxénète.

Au Canada :

  • 80 % des personnes prostituées auraient commencé alors qu’elles étaient mineures (moins de 18 ans).

Au Québec :

  • 85 % des femmes prostituées auraient été victimes d’abus sexuels avant leur entrée en prostitution.
  • 5 à 20 % des prostituées travailleraient dans la rue.

À Montréal :

  • 200 salons de massage et 30 bars de danses contact.

La traite

  • 79 % des victimes de la traite le sont à des fins d’exploitation sexuelle; 79 % sont des femmes ou des filles.
  • 48 % des victimes de la traite à des fins de prostitution sont âgées de moins de 18 ans.
  • Le Canada est reconnu comme étant un pays de destination et de transit de la traite internationale. 600 à 800 personnes entrent chaque année dans le cadre de la traite; 1 500 à 2 200 personnes faisant l’objet de la traite passent par le Canada pour être ensuite exploitées aux États-Unis.

Une industrie lucrative pour le crime organisé qui appauvrit les femmes :

  • Le crime organisé est le premier bénéficiaire du commerce de la prostitution et on s’en sert pour le blanchiment d’argent.
  • Les profits de la traite représenteraient annuellement autour de 31,6 milliards $.
  • Les victimes d’exploitation sexuelle rapportent autour de 27,8 milliards de dollars.


Annexe 2 – Recommandations issues de l’avis

A) Sur le plan juridique

  1. Que le ministre de la Justice du Québec porte la voix du Québec à la Table des ministres de la Justice du Canada, en proposant un renversement des priorités en matière de prostitution basé sur les éléments suivants :

  • Dans l’optique de décriminaliser les personnes victimes de la prostitution, modifier l’article sur la communication (article 213 du Code criminel) afin qu’il ne vise plus les personnes prostituées, mais qu’il demeure applicable aux clients.
  • Adopter une loi qui criminalise l’achat de services sexuels, à l’instar de la Suède, et maintenir les articles interdisant le proxénétisme (article 212 du Code criminel) et la tenue d’une maison de débauche (article 210). Toutefois, modifier les articles 197, 210 et 211, afin qu’ils s’appliquent aux propriétaires, tenanciers et clients, mais qu’ils ne visent plus les personnes prostituées.

  1. Dans l’attente des modifications au Code criminel, que des accusations soient portées sous les articles existants contre des proxénètes et des clients, et qu’elles ne visent pas les personnes prostituées. Que le gouvernement du Québec prenne les mesures nécessaires afin de sensibiliser, en ce sens, les corps policiers et le milieu judiciaire.
  2. Que le gouvernement du Québec fasse pression pour que soit supprimée la promotion de services sexuels dans les petites annonces des journaux, les médias électroniques, Internet et dans l’espace public (panneaux publicitaires ou autres).

B) Sur le plan social

  1. Que la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine mette en œuvre la mesure 86 de son plan d’action pour l’égalité entre les femmes et les hommes 2011-2015 : « Sensibiliser la population pour prévenir l’exploitation sexuelle et venir en aide aux femmes qui veulent quitter le milieu de la prostitution ». Pour ce faire, qu’une enveloppe financière suffisante soit dégagée.
  2. Afin d’aider les personnes à sortir de la prostitution, que des services spécialisés soient mis à leur disposition : maisons d’hébergement pour elles; services de désintoxication; aide psychologique adaptée; aide sur le plan de la formation professionnelle et de la réinsertion sociale et économique; aide juridique afin d’obtenir un pardon pour les condamnations liées à la communication à des fins de prostitution. De tels services devront tenir compte des besoins particuliers des femmes autochtones qui sont surreprésentées dans la prostitution.
  3. Que les organismes terrain dont la mission est d’aider les personnes prostituées à quitter ce milieu soient subventionnés.
  4. Compte tenu des vulnérabilités particulières des victimes de la traite, que des ressources financières soient accordées pour soutenir les initiatives terrain visant à les soustraire à l’exploitation sexuelle et à leur offrir des solutions économiques viables.
  5. Que soient mis en place des projets porteurs inspirés de deux projets existants qui ont fait leur preuve : le projet Mobilis pour protéger les mineures des centres jeunesse contre les proxénètes, et le projet Les Survivantes, constitué d’une escouade policière spécialisée qui traque les proxénètes et aide les personnes prostituées à s’en sortir.
  6. Que des programmes éducatifs soient mis sur pied afin de prévenir l’entrée dans la prostitution et de contrer sa banalisation, des programmes destinés aux filles et aux garçons, particulièrement auprès des jeunes vulnérables et des populations à risque.
  7. Que de la formation et de la sensibilisation soient faites auprès des intervenantes et intervenants, et des milieux policiers et judiciaires concernés par l’intervention directe auprès des personnes prostituées et victimes de la traite.
  8. À l’instar de la Suède, que le gouvernement réalise une vaste campagne d’information auprès de la population en général et des clients en particulier afin de décourager l’achat de services sexuels et de montrer les préjudices qui découlent de la prostitution.

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Pour information

Isabelle Desbiesn
Attachée de presse
Conseil du statut de la femme
isabelle.desbiens@csf.gouv.qc.ca
Cellulaire : 418 473-4035

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