Mémoire – Rapport sur la mise en œuvre du Plan d’action gouvernemental 2008-2013 en matière d’agression sexuelle

Ce document est la version HTML accessible du Mémoire – Rapport sur la mise en œuvre du Plan d’action gouvernemental 2008-2013 en matière d’agression sexuelle, disponible en format PDF sur le site Web du Conseil du statut de la femme.

« Le défi […] consiste à admettre que l’éradication de la violence contre les femmes est une chose compliquée, difficile, qui nous oblige à combattre certaines des croyances les plus enracinées de la société; que c’est un projet de longue haleine, nécessitant des ressources importantes et à long terme; que cela demande engagement et passion pour continuer, même si les résultats paraissent vagues et difficiles à prouver; enfin que nous ne devons pas trahir la confiance de ces millions de femmes torturées de milles façons au seul motif qu’elles sont des femmes» (Pickup, 2001, p. 306, dans Romito, 2006, p. 257).

Table des matières

Introduction

Au fil des ans, le Conseil du statut de la femme s’est penché à de nombreuses reprises sur l’épineuse question de la violence exercée contre les femmes et les filles. De l’avis du Conseil, la violence contre les femmes et les filles se situe au cœur même des inégalités entre les sexes en étant à la fois une de ses principales conséquences et un moteur qui contribue à les maintenir, les renforcer et les reproduire. Cette violence se perpétue notamment parce que, d’une certaine manière, elle est tolérée. À cet égard, le Conseil croit que la réponse sociale à la prévention de la violence contre les femmes et les filles, et la quête de l’égalité entre les sexes sont étroitement liées. En effet, du point de vue du Conseil, qu’il s’agisse des agressions sexuelles, de la cyberviolence, de la violence en milieu de travail, de la violence conjugale, du harcèlement sexuel, de la traite des femmes ou des filles, des mutilations génitales, de l’exploitation sexuelle, ou des violences basées sur l’honneur, toutes les formes de violence dirigées contre les femmes et les filles ont comme dénominateur commun les rapports de pouvoir entre les hommes et les femmes. De même, la violence vécue par les garçons résulte de divers rapports de pouvoir.

Au-delà des histoires d’horreur de femmes violées, battues, tuées ou humiliées rapportées souvent avec éclats par les médias, il existe au Québec une réalité quotidienne dans laquelle vivent des milliers de femmes et de filles victimes de violence. Cette réalité qui, la plupart du temps échappe aux regards, a été révélée brutalement par la vague de dénonciations d’agressions sexuelles qui a déferlé sur le Québec en novembre dernier. Bien que de nombreux efforts aient été consentis par l’État québécois dans les dernières décennies pour vaincre ce fléau social, l’ampleur du phénomène demeure très préoccupante, voire alarmante.

Au fil du temps, le Québec s’est doté de politiques publiques, de plusieurs plans d’action et de nombreuses mesures pour contrer la violence faite aux femmes et aux filles. À cet égard, le Québec fait figure de chef de file à l’échelle nationale et internationale. De façon plus spécifique, des organismes de soutien sont aujourd’hui actifs partout en province pour venir en aide aux femmes et aux filles victimes de violence sexuelle et des modifications au traitement des dossiers sociojudiciaires de violence ont été initiées afin d’améliorer la réponse du système judiciaire face aux personnes victimes de violence1.

Pourtant, la honte, la peur de ne pas être crues et les préjugés dont elles sont souvent victimes entravent encore la prise de parole des femmes et des filles pour dénoncer ce qu’elles ont vécu. Ce silence qui plane sur tous ces drames a pu contribuer à faire croire collectivement que les choses allaient mieux et que les ressources mises en place étaient suffisantes pour aider les femmes et les filles qui en avaient besoin. La prise de parole massive à l’automne 2014 a ébranlé ces croyances. En effet, malgré le discours politique, les lois, les orientations, les actions et les stratégies de communication, les victimes persistent à se taire. Il faut donc reconnaître que tout cela ne suffit pas et que de nouvelles stratégies pour prévenir et endiguer la violence sexuelle au Québec doivent être imaginées et mises en œuvre.

Le 25 novembre dernier, l’Assemblée nationale du Québec a déposé une motion demandant à la Commission des relations avec les citoyens de tenir des consultations publiques sur le Rapport sur la mise en œuvre du Plan d’action gouvernemental 2008-2013 en matière d’agression sexuelle.

Pour le Conseil du statut de la femme, cette consultation est l’occasion de faire un rappel de ses réflexions et positions sur la violence exercée contre les femmes et les filles, et de proposer quelques pistes d’action pour prévenir et contrer les agressions sexuelles.

Quelques éléments de contexte

Partout dans le monde, la violence envers les femmes et les filles est considérée comme un problème extrêmement préoccupant. Les résultats d’une étude réalisée par ONU-Femmes en 2011 dans 86 pays révélaient que le phénomène de la violence exercée contre les femmes et les filles constitue « […] la forme d’atteinte aux droits fondamentaux la plus envahissante dans le monde aujourd’hui […] » (ONU-Femmes, 2013, dans Rinfret-Raynor et Lesieux, 2014, p. 1).

Plusieurs organisations internationales se sont prononcées officiellement depuis plus de 20 ans pour dénoncer la violence que subissent les femmes et les filles dans le monde et pour affirmer que cette violence prend racine dans les rapports inégaux entre les femmes et les hommes. Dans sa Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes2, adoptée en 1993, l’Assemblée générale des Nations Unies a reconnu que la violence envers les femmes est la manifestation de rapports de force historiquement inégaux, qui ont abouti à la domination des hommes sur les femmes dans tous les secteurs de la vie privée et publique. De l’avis des membres du Conseil de l’Europe et des Nations Unies, les violences envers les femmes et les filles « doivent être comprises comme des actes de violence fondés sur le genre »; ils précisent que cette violence « est perpétrée à l’encontre d’une femme, parce que c’est une femme » (Conseil de l’Europe, 2008, p. 10 cité dans Smedslund et Risse, 2014, p. 6).

En 2010, les États et gouvernements membres de la Francophonie ont adopté une déclaration commune dans le domaine des violences faites aux femmes et aux filles dans laquelle ils réaffirment que « toutes violations des droits de la personne humaine perpétrées contre les femmes et les filles doivent être combattues avec fermeté et que la violence à l’égard des femmes et des filles constitue la forme ultime des discriminations fondées sur le genre » (Organisation internationale de la Francophonie, 2010, p. 2).

Rappel historique

Au Québec, comme ailleurs dans le monde, les années 1970 ont marqué un tournant dans la lutte contre les violences commises à l’endroit des femmes et des enfants. Comme le souligne fort à propos l’auteure féministe Patrizia Romito, la violence est sortie de l’ombre grâce aux revendications des groupes de femmes :

À cet égard, nous savons que le mouvement des femmes a été fondamental pour une prise de conscience, pour la production d’un savoir et l’éveil d’une résistance. Il a remis en question les modèles naturalistes et psychologisants de la violence, a révélé au grand jour le réseau des complicités – souvent institutionnelles – qui permet à l’homme violent de continuer à agir sans jamais être dérangé et en toute impunité; ce sont les femmes en mouvement qui ont conçu, proposé et parfois imposé toute une série de mesures pour contrer la violence. (Romito, 2006, p. 11).

Le mouvement des femmes a permis de briser le silence sur ce qui était jusqu’alors tenu secret. Dorénavant, la violence contre les femmes et les filles n’est plus une affaire d’ordre privé, mais bien un problème social majeur. Les groupes de femmes sont également à l’origine de la création de lieux de soutien pour les femmes victimes de violence. Au Québec, les centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS) ont, depuis, développé une solide expertise en cette matière.

En 1985, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) reconnaissait l’importance de la violence conjugale et des agressions sexuelles en instituant la Politique d’aide aux femmes violentées. En 1987, les ministères de la Justice et de la Sécurité publique rendaient publique une Politique d’intervention judiciaire en matière de violence conjugale. « Désormais, certains actes de violence conjugale seront reconnus comme des crimes contre la personne et non plus comme de simples « chicanes de ménage » » (Cadrin, 1999, p 11). À ce moment-là, il ne sera plus question d’une politique globale destinée à prévenir et contrer toutes les violences faites aux femmes, mais uniquement d’une politique en matière de violence conjugale. Cinq ans plus tard, en 1992, le MSSS présentait des Orientations ministérielles en matière de violence conjugale qui privilégient une approche féministe de l’intervention auprès des conjoints violents afin de les responsabiliser. En 1995, une politique gouvernementale générale en matière de violence conjugale, Prévenir, dépister, contrer la violence conjugale voit le jour et un plan d’action est mis sur pied.

La même année, un rapport intitulé Les agressions sexuelles: STOP est déposé et recommande au gouvernement de se doter d’orientations claires en matière de lutte contre les agressions sexuelles. C’est en 2001 que le gouvernement du Québec présente, après six ans de travail de concertation avec des représentants de nombreux ministères, organismes et services, ses Orientations gouvernementales en matière d’agression sexuelle accompagnées d’un premier Plan d’action gouvernemental en matière d’agression sexuelle qui couvre la période de 2001 à 2006. Compte tenu de la complexité de la problématique et des nombreux mythes et croyances qui l’entourent, il est apparu essentiel de se donner une compréhension commune de l’agression sexuelle et de la définir. Ainsi, dans les orientations gouvernementales en matière d’agression sexuelle, une définition est proposée qui reconnaît que « l’agression sexuelle est un acte de pouvoir et de domination de nature criminelle » :

Une agression sexuelle est un geste à caractère sexuel, avec ou sans contact physique, commis par un individu sans le consentement de la personne visée ou, dans certains cas, notamment dans celui des enfants, par une manipulation affective ou par du chantage. Il s’agit d’un acte visant à assujettir une autre personne à ses propres désirs par un abus de pouvoir, par l’utilisation de la force ou de la contrainte, ou sous la menace implicite ou explicite. Une agression sexuelle porte atteinte aux droits fondamentaux, notamment à l’intégrité physique et psychologique et à la sécurité de la personne (Gouvernement du Québec, 2001, p. 22).

En 2008, le gouvernement rend finalement public le deuxième Plan d’action gouvernemental en matière d’agression sexuelle qui fait actuellement l’objet d’une consultation publique dans le cadre de laquelle s’inscrit ce mémoire du Conseil du statut de la femme. Dans ce plan, 100 engagements sont inscrits afin d’améliorer les interventions gouvernementales en cette matière, notamment auprès des communautés autochtones et des communautés culturelles. Il a été prolongé en décembre 2013, jusqu’à l’adoption du nouveau plan d’action. Le 26 février 2015, la ministre responsable de la Condition féminine a annoncé la prolongation d’un an des mesures de l’actuel plan d’action afin de tenir des consultations dans le cadre d’une commission parlementaire et du forum sur les agressions sexuelles. Comme ce bref historique le démontre, les actions pour contrer la violence conjugale ont 20 ans d’avance sur celles entreprises en matière d’agression sexuelle.

Les agressions sexuelles contre les femmes et les filles : un portrait statistique

Au Québec et au Canada, deux méthodes d’enquête sont utilisées pour répertorier les cas d’agressions sexuelles : les enquêtes de victimisation et les données policières.

Les enquêtes de victimisation ou populationnelles reposent sur la perception des personnes sondées (violence autodéclarée), ce qui la distingue de la violence rapportée aux corps policiers.

La principale source de données sur la violence faite aux femmes est issue des corps policiers. Ceux-ci sont responsables de recueillir, pour le Programme de déclaration uniforme de la criminalité (DUC), les renseignements en relation avec les infractions criminelles survenues sur leur territoire, qu’ils ont découvertes ou qui leur ont été signalées (MSP, 2008, p. 11). Il n’est toutefois pas possible d’évaluer précisément les « taux réels » d’agressions sexuelles en se basant uniquement sur les signalisations à la police, puisque ces cas demeurent fragmentaires. Plusieurs agressions demeurent, en effet, non dénoncées. Encore aujourd’hui, il s’avère donc extrêmement difficile de mesurer l’ampleur des violences exercées contre les femmes et les filles, car bien que l’agression sexuelle soit reconnue comme un acte criminel, ce crime est rarement déclaré à la police : « Il est important de souligner que le nombre d’agressions sexuelles déclarées par la police sous-estime vraisemblablement le nombre d’agressions sexuelles […]. Les données sur la victimisation autodéclarée révèlent que la majorité (88 %) des agressions sexuelles subies par les Canadiens de 15 ans et plus ne sont pas portées à l’attention de la police » (Perreault et Brennan, 2010 dans Boyce, Cotter et Perreault, 2014, p. 19). Ce taux s’élèverait à 90 % pour les agressions sexuelles perpétrées par une autre per- sonne que le conjoint (Sinha, 2013, p. 10)3.

Déjà en 1995, le Conseil s’inquiétait du phénomène de sous-déclaration des agressions sexuelles à la police : « Ce faible taux de signalement contribue à la méconnaissance de ce phénomène qui, à son tour, entraîne des répercussions sérieuses dans l’organisation des services destinés aux femmes agressées sexuellement » (CSF, 1995, p. 12).

Le Conseil du statut de la femme considère néanmoins que les données policières, notamment celles recueillies par le ministère de la Sécurité publique (MSP) pour le Québec, constituent actuellement la meilleure source de données quantitatives générales sur les violences vécues par les femmes, dont les agressions sexuelles4, même si le portrait qu’il dresse ne contient que les gestes signalés par les victimes et inscrits au Code criminel.

Selon les plus récentes données du ministère de la Sécurité publique du Québec, on observe en 2013 une légère baisse du nombre total de dénonciations d’agressions sexuelles (3 855) par rapport à 2012 (3 867) (MSP, 2015a, p. 5). Toutefois, cette information ne nous permet pas d’affirmer que les agressions sexuelles sont en baisse au Québec. En réalité « […] les taux d’agressions sexuelles sont extrêmement variables au fil des ans et celles de 2013 n’indiquent pas une tendance [à la hausse ou à la baisse] vérifiable à moyen ou long terme » (MSP, 2015a, p. 5).

Par ailleurs, il faut mentionner que les données issues du MSP, portant sur la criminalité commise dans un contexte conjugal au Québec (MSP, 2015b), révèlent que le taux d’agressions sexuelles en contexte conjugal augmente en moyenne de 2,7 % par année. Il est passé de 5,5 infractions par 100 000 habitants en 2004 à 7,2 en 2013 (+ 31,0 %) et le nombre de 361 à 514 (MSP, 2015b, p. 7).

Précisons que ces statistiques reflètent des agressions sexuelles dénoncées au cours d’une même année, non pas l’année où elles ont été perpétrées. À ce sujet, on observe une augmentation (+ 4 %) des infractions sexuelles signalées plus de 20 ans après l’agression par rapport à 2012 (MSP, 2015a, p. 4). Les données de 2013 indiquent que les jeunes victimes d’infractions sexuelles signalent moins rapidement leurs agressions que les adultes. Ainsi, près de la moitié des adultes (42,6 %) ont signalé le crime sans aucun délai, alors que ce pourcentage est de 26,4 % pour les mineures (MSP, 2015c, p. 1).

Les femmes dominent dans les statistiques sur les agressions sexuelles. Plus précisément, en 2013, la proportion de femmes victimes d’agressions sexuelles est nettement plus élevée, tous âges confondus, que celle des hommes, soit 83 % par rapport à 17 % (MSP, 2015a, p. 14). En 2013, 97 % des auteurs des agressions sexuelles étaient des hommes (76 %) et des garçons (21 %). Le portrait des victimes d’agressions sexuelles, pour ce qui est de l’âge et du sexe, demeure inchangé depuis les dix dernières années.

Au Québec, les jeunes, en particulier les filles, sont particulièrement touchées. Ainsi, pour l’ensemble des infractions sexuelles, les deux tiers des victimes ont moins de 18 ans, 78 % sont des jeunes filles et 22 % des jeunes garçons (MSP, 2015a, p. 14). En outre, les données révèlent que la fréquence des infractions sexuelles est plus élevée auprès des très jeunes filles, âgées de 12 et 14 ans. Le taux de victimisation de celles-ci (773,5 par 100 000 habitants) est particulièrement inquiétant puisque disproportionné par rapport à celui de la population générale (106,9 pour 100 000 habitants). Aussi, les données révèlent que ce taux a connu une hausse de 13,3 % par rapport à 2012 (MSP, 2015a, p. 15).

Les données récentes fournies par le MSP nous renseignent sur les liens qui unissent la victime à son agresseur (MSP, 2015a, p. 18). Dans la majorité des cas, les victimes connaissent leur agresseur. Cette proportion s’élève à 85,6 % chez les jeunes victimes comparativement à 63,3 % chez les adultes. Pour ces dernières, l’agression a été perpétrée le plus souvent par un étranger (24,2 %) une connaissance (20,2 %) ou un ex-conjoint (19,8 %). Pour les jeunes victimes, l’auteur de l’agression est le plus souvent une connaissance (22,2 %) ou un parent (12 %). Ce lien de proximité entre la victime et son agresseur explique pourquoi l’agression se déroule dans une résidence privée pour 70 % des victimes mineures et 58,4 % des adultes (MSP, 2015a, p. 17).

Dans les dernières années (2009-2011), les tentatives de meurtre et les voies de fait perpétrées contre les femmes ont diminué au Canada. Cependant, on observe que le taux d’agressions sexuelles commises contre les femmes a augmenté en 2010 pour demeurer stable en 2011 (Sinha, 2013, p. 8). Au Canada, en 2011, les femmes étaient 11 fois plus nombreuses que les hommes à être victimes d’agressions sexuelles (Sinha, 2013, p. 8). Le pourcentage de femmes victimes d’infractions sexuelles était également beaucoup plus élevé chez les femmes que chez les hommes dans toutes les provinces et tous les territoires (Sinha, 2013, p. 30). Toutefois, on observe une grande variation de la fréquence d’un bout à l’autre du pays. Le Manitoba et la Saskatchewan (respectivement, 189 et 164 victimes pour 100 000 femmes) occupaient, les premier et deuxième rangs des provinces où la prévalence des violences sexuelles envers les femmes est la plus élevée. C’est le Québec (69) et l’Île-du-Prince-Édouard (69) qui affichaient les taux les plus bas (Sinha, 2013, p. 30).

Un grand nombre de victimes gardent le silence pour différentes raisons. Dans certains cas, elles craignent leur agresseur, qu’elles connaissent dans la plupart des cas (Sinha, 2013, p. 32). Pour d’autres victimes, la peur de ne pas être crues, la honte et la culpabilité les incitent à ne pas dénon- cer leur agresseur (Direction générale de la Condition féminine de l’Ontario, page consultée le 20 mars 2015, p. 100). D’autres encore, croient que la police ne peut pas les aider et elles manquent de confiance dans l’efficacité du système judiciaire (Gouvernement du Québec, 2001, p. 50). Aussi, un grand nombre de victimes (58 %) pensent que ce qu’elles ont vécu n’est pas assez grave pour être dénoncé aux autorités (Brennan et Taylor-Butts, 2008, p. 8). Enfin, les recherches indiquent que plusieurs victimes (49 %) ne dénoncent pas leur agression, car elles continuent de croire que c’est une affaire d’ordre personnel qui relève de leur vie privée (Sable et al., 2006; Felson et Paré, 2005 dans Brennan et Taylors-Butts, 2008, p. 8 ).

Si la dénonciation d’une agression est difficile pour les adultes, il semble qu’elle le soit encore davantage pour les adolescentes et les adolescents (Fondation Tel-jeunes, page consultée le 19 décembre 2015). Dans un communiqué publié en novembre 2014, la Fondation Tel-jeunes révélait que près de deux jeunes par jour les appellent pour obtenir de l’aide après avoir subi une agression sexuelle. Selon une intervenante de la Fondation, il est plus difficile pour les jeunes de dénoncer compte tenu de leur mode de vie particulier : « Les adolescents vivent en quelque sorte dans une « micro-société » dans laquelle ils se côtoient à l’école et dans leurs activités extra-scolaires. Ils sont également très présents sur les réseaux sociaux : tout le monde se connaît, et l’information va très vite. »

La période de l’adolescence est aussi une étape de la vie où les jeunes expérimentent leurs premières relations amoureuses et où ils apprennent à identifier leurs désirs, leurs besoins, mais aussi à établir leurs limites. Le manque d’expérience peut les amener à mettre en doute ce qu’ils ont vécu et les faire hésiter à dénoncer : « […] certains jeunes peuvent vivre des situations de violence, et ce, parfois sans repères pour identifier la violence et trouver une issue » (Hébert, [et al.], page consultée le 21 janvier 2015, p. 1).

Certaines étapes de la vie des femmes sont plus propices que d’autres à la violence qui est exercée contre elles. La période de l’adolescence, par exemple, se caractérise par une plus grande prévalence de la violence (Rinfret-Raynord et Lesieux, 2014, p. 2). Rappelons qu’au moment d’entrée dans l’adolescence, les jeunes filles élargissent leur cercle d’amis et leurs activités. Le risque est alors plus grand qu’elles soient victimes de violence sexuelle par quelqu’un d’autre qu’un membre de sa famille, comme un partenaire amoureux (Sinha, 2013, p. 17).

Tous ces constats sont lourds de sens. De fait, il faut bien reconnaître que malgré tous les efforts réalisés et les investissements engagés dans la prévention des agressions sexuelles et l’accompagnement des victimes depuis maintenant une vingtaine d’années, la partie est loin d’être gagnée et les résultats auxquels nous devrions nous attendre ne sont toujours pas au rendez-vous. En outre, il est troublant de constater que ce sont les jeunes filles qui demeurent les plus touchées par cette forme de violence, voire les très jeunes filles avec tout ce que cela implique comme répercussions physiques, psychologiques et sociales sur leur vie actuelle et future.

Conséquences des agressions sexuelles

Les agressions sexuelles subies dans l’enfance, à l’adolescence ou à l’âge adulte entraînent leur lot de conséquences non seulement chez les victimes, mais aussi pour l’entourage et l’ensemble de la société. Une agression sexuelle a de nombreuses répercussions physiques, psychologiques et comportementales, tant chez les adultes que chez les enfants qui en sont victimes. Les enfants victimes sont « […] plus à risque que les autres jeunes d’être victimes de violence dans leurs premières relations amoureuses et sont 2 à 5 fois plus à risque d’être victime d’agression sexuelle à l’âge adulte » (Collin-Vézina, Hébert et Daigneault, Page consultée le 20 janvier 2015, p. 3). Aussi, il est reconnu que la violence dans les relations amoureuses à l’adolescence a de graves conséquences sur la santé mentale, physique et sexuelle des jeunes victimes (Hébert, [et al.], page consultée le 21 janvier 2015, p. 2). Des données québécoises récentes issues de l’Enquête sur le parcours amoureux des jeunes (Enquête PAJ), réalisée auprès d’élèves du secondaire, indiquent que :

[…] une fille sur cinq rapporte au moins un épisode de coercition sexuelle de la part de son partenaire amoureux tandis que le rapport est de 1 sur 15 pour les garçons (Hébert, et al., en préparation dans Hébert, [et al.], page consultée le 21 janvier 2015, p. 2).

Les données de Statistiques Canada révèlent que la violence faite aux femmes aurait deux à trois fois plus de répercussions sur les services sociaux que la violence exercée contre les hommes (Sinha, 2013, p. 93). Selon l’auteure de l’étude, cela pourrait « témoigner des différences de la gravité des actes de violence à l’endroit des femmes et des hommes » (Sinha, 2013, p. 93).

Selon les estimations du ministère de la Justice, les agressions sexuelles et les autres infractions sexuelles auraient coûté 4,8 milliards de dollars en 2009 à la société canadienne en frais de justice, en soins de santé et coûts subis par des tierces parties (pertes subies pour les employeurs, services aux victimes, etc.) (Hoddenbagh, Zhang et Macdonald, 2014, p. 192).

Agressions sexuelles et autres infractions d’ordre sexuel5 – Résumé des coûts (visibles et invisibles) (2009)
Catégorie de coûts subis par : Femmes victimes Hommes victimes Total
Total des coûts 3 588 274 006 $ 1 228 318 821 $ 4 816 592 826 $
Le système de justice (services de police, tribunaux et services correctionnels) 137 693 965 $ 12 355 133 $ 150 049 098 $
Les victimes (frais médicaux, perte de salaire et souffrances) 3 415 498 849 $ 1 200 679 349 $ 4 616 178 197 $
Les tierces parties (employeurs, services sociaux (services aux victimes), services funéraires, etc.) 35 081 192 $ 15 284 339 $ 50 365 531 $

Source : Ministère de la Justice, 2014, http://www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/jp-cj/victim/rr14_01/conc.html.

Les conséquences d’une agression sexuelle « sont multiples et peuvent perdurer tout au cours de la vie et se poursuivre à travers les générations avec des effets néfastes sur la santé, l’éducation, l’emploi, la criminalité et la condition économique des victimes, mais aussi de leurs familles, des communautés et des sociétés » (Organisation mondiale de la santé (OMS) 2010, dans Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), page consultée le 21 janvier 2015a). Pour le Conseil, toutes les formes de violence que subissent les femmes, en plus d’hypothéquer lourdement leur vie, limitent par ailleurs le potentiel de développement social et économique de l’ensemble de la collectivité québécoise, en plus de nuire à l’égalité entre les femmes et les hommes.

La réflexion du conseil du statut de la femme sur cet enjeu

Depuis le début de son mandat, le Conseil du statut de la femme s’est prononcé à maintes reprises pour dénoncer la violence dont sont victimes les femmes et les filles (CSF, 1978, 1984, 1985, 1986, 1991, 1993, 1995, 1997, 1998-1999, 2000, 2004, 2005, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013). Il s’est attardé à la compréhension des causes à l’origine des différentes formes de violence qui s’exercent à l’égard des femmes et des filles, s’est intéressé à l’amélioration des conditions de vie dans lesquelles doivent vivent les victimes et a recommandé des stratégies pour prévenir et contrer les violences faites aux femmes et aux filles, pour que cesse l’inacceptable6.

Du point de vue du Conseil, il est clair que les avancées réalisées en matière d’égalité entre les femmes et les hommes sont indispensables pour réduire de façon substantielle l’incidence de la violence faite aux femmes et aux filles dans notre société. À cet égard, toutes les recommandations faites par le Conseil depuis sa création concernant l’accès des femmes à l’éducation et au travail, à l’égalité économique, à l’équité en emploi, à la santé reproductive, etc., sont étroitement liées à la question de la lutte contre la violence faite aux femmes.

Égalité et violence

De l’avis du Conseil, la violence exercée contre les femmes et les filles, notamment les violences sexuelles, résultent d’une discrimination basée sur le sexe qui empêche les femmes d’accéder à tous leurs droits et libertés au même titre que les hommes. En ce sens, la violence faite aux femmes et aux filles constitue un frein majeur à l’atteinte de l’égalité entre les femmes et les hommes. En d’autres mots, « la violence est une façon de perpétuer l’inégalité entre les hommes et les femmes en remettant celles-ci à «leur» place » (CSF, 1993, p. 29). En effet, la violence est avant tout une affaire de rapport de pouvoir qui, pour être enrayée, doit s’appuyer sur des changements fondamentaux au sein des rapports hommes-femmes et dans l’ensemble de la société. Il est, dans cet esprit, essentiel de réfléchir à la violence dans une perspective de genre, c’est-à-dire qui admet d’abord l’existence d’une hiérarchie sociale entre les sexes qui s’appuie sur les différences socialement entretenues entre les hommes et les femmes. Cette distinction hiérarchique entre les sexes est systémique et elle s’articule avec d’autres facteurs tels l’origine ethnique et l’orientation sexuelle. À cet égard, le Conseil tient à rappeler ici que « la violence contre les femmes n’est pas une somme de gestes individuels isolés; elle constitue une structure sociale de domination » (CSF, 1993, p. 2).

Une réponse sociale à la violence

Bien que certains facteurs de vulnérabilité individuels ou familiaux puissent être associés au risque d’être victime de violence sexuelle, le Conseil croit que le phénomène de la violence est avant tout un problème social qui exige une réponse sociale. Déjà en 1993, dans son avis intitulé Pour que cesse l’inacceptable: Avis sur la violence faite aux femmes, le Conseil recommandait que la réponse sociale à la violence exercée contre les femmes et les filles s’appuie sur des principes forts qui demeurent pertinents aujourd’hui :

  1. La violence faite aux femmes [et aux filles] sous toutes ses formes est inacceptable et contrevient à leur droit à l’intégrité, à l’autonomie et à la participation pleine et entière à la vie sociale.

  2. Une réponse sociale globale et intégrée est nécessaire pour mettre fin à toutes formes de violence faite aux femmes [et aux filles].

  3. Les structures sociales et les rapports de genre qui entretiennent l’inégalité des femmes et des hommes doivent être profondément transformés afin de prévenir la violence contre les femmes [et les filles].

  4. La protection et le soutien des femmes [et des filles] victimes de violence et la responsabilisation des hommes et des garçons agresseurs doivent être au cœur des actions pour contrer la violence faite aux femmes [et aux filles] (CSF, 1993, p. 49).

De même, dans plusieurs de ses avis, le Conseil soulève l’importance de tenir compte des femmes qui vivent plusieurs formes de discriminations (CSF, 1978, 1993, 1995, 1997, 2004, 2007, 2010, 2012, 2014) comme les autochtones, les handicapées, les lesbiennes et les immigrantes. Récemment, le CSF a publié un avis fouillé sur la prostitution (2012) et une étude assortie de recommandations à l’intention du gouvernement du Québec pour prévenir et contrer le phénomène des violences liées à l’honneur (2014).

Les recommandations du Conseil s’attardent également au processus judiciaire entourant les crimes violents contre les femmes (exemplarité des sentences, soutien accordé aux victimes, etc.) (CSF, 1993, p. 102). En 2012, la présidente du Conseil du statut de la femme a soumis au gouvernement des commentaires quant aux délais de prescription applicables aux actions en responsabilité civile des actes criminels, dans le contexte du projet de loi 70 qui prévoyait faire passer ces délais de trois à dix ans afin d’aider les victimes. Le Conseil du statut de la femme considérait alors cette proposition comme un pas dans la bonne direction, mais aurait souhaité pousser le débat plus loin en proposant d’abolir tout délai de prescription pour ainsi faciliter les recours en justice des victimes d’agressions sexuelles. Malheureusement, le projet de loi a été abandonné lors du déclenchement des élections provinciales en août 2012.

Analyse du rapport sur la mise en œuvre du plan d’action gouvernemental 2008-2013 en matière d’agression sexuelle et recommandations

D’entrée de jeu, le Conseil tient à saluer toutes les actions entreprises par le gouvernement du Québec dans le but de mettre fin aux violences exercées contre les femmes et les filles, particulièrement en matière d’agression sexuelle dans le cadre du Plan d’action gouvernemental 2008-2013 en matière d’agression sexuelle. D’une part, le nombre de mesures réalisées dans le cadre de ce plan d’action est très élevé : plus d’une centaine sur une période cinq ans. De plus, des initiatives diversifiées se sont déployées sur plusieurs fronts, qui ont sollicité la participation de nombreux partenaires et certainement exigé de grands efforts de concertation.

À l’exemple des Orientations gouvernementales en matière d’agression sexuelle, le Rapport sur le Plan d’action gouvernemental 2008-2013 en matière d’agression sexuelle s’articule autour de quatre axes d’intervention :

  1. La promotion de valeurs fondamentales;
  2. La prévention;
  3. Le dépistage;
  4. L’intervention psychosociale, médicale, judiciaire et correctionnelle.

Avant de commenter de manière plus spécifique les mesures présentées dans le Rapport, le Conseil souhaite apporter quelques remarques et réflexions d’ordre plus général.

Les orientations gouvernementales de 2001 et les actions pour prévenir et contrer les agressions sexuelles.

Le Conseil tient d’abord à rappeler que les orientations ciblées en 2001 en matière de lutte aux agressions sexuelles doivent demeurer au cœur des initiatives et des actions à privilégier dans les plans d’action. Elles représentent le fruit de six années de travail, réalisé par un ensemble de partenaires qui ont réussi à s’entendre sur une vision et une approche communes en matière de stratégie pour lutter contre les agressions sexuelles.

Afin d’étudier la problématique des agressions sexuelles, les représentants et représentantes des milieux gouvernemental, paragouvernemental et communautaire directement concernés par cette question ont été réunis au sein d’un groupe de travail. Cet exercice sans précédent dans le domaine des agressions sexuelles a fait ressortir l’urgence de parvenir à une compréhension globale ainsi qu’à une vision commune afin de les contrer adéquatement. (Gouvernement du Québec, 2001, p. 12).

La grande quantité des mesures réalisées dans le dernier plan d’action laisse une impression d’éparpillement. Certaines actions pérennes et structurantes côtoient des initiatives ponctuelles qui apparaissent isolées les unes des autres. Malgré le regroupement de ces réalisations autour d’axes d’intervention bien identifiés, il est difficile de bien saisir comment elles s’articulent les unes aux autres, autour de la stratégie de lutte aux agressions sexuelles. Par exemple, l’annexe VI du rapport dresse la liste des principales réalisations locales et régionales du réseau de la santé et des services sociaux visant « à prévenir et contrer les agressions sexuelles ». Cela représente plus d’une centaine d’initiatives réparties dans 17 régions du Québec. Le Conseil reconnaît l’importance d’adapter les initiatives en matière d’agression sexuelle aux besoins et aux réalités des milieux régionaux particuliers. Toutefois, une telle régionalisation, si elle n’est pas intégrée dans une approche commune, ne risque-t-elle pas de minimiser les chances d’obtenir des résultats systémiques et structurants?

Face à ce vaste éventail d’initiatives se pose aussi la question du suivi et de l’évaluation des actions entreprises. Dans l’ensemble, les informations contenues dans le rapport portent sur la quantité et les coûts associés aux actions réalisées, mais aucun indice d’une éventuelle mise en place d’un plan de suivi et d’évaluation n’est présent dans le rapport. Dans ce contexte, comment identifier les initiatives à considérer comme de bonnes pratiques, efficaces et prometteuses pour lutter contre les agressions sexuelles? À titre d’exemple, le plan d’action précise que le Secrétariat à la condition féminine offre depuis 2008 au personnel des services de garde une vidéo, un guide, une formation ainsi qu’une grille pour analyser le matériel didactique destiné aux enfants dans le but de soutenir la promotion des rapports égalitaires entre les filles et les garçons dès la petite enfance. Le bilan de cette action dans le rapport ne précise que la quantité de matériel distribué, mais non l’utilisation et l’appréciation de ce matériel. Une fois le matériel et les formations diffusés, que reste-t-il? De quelle manière ces outils sont-ils utilisés et intégrés dans l’intervention?

En 2001, les orientations gouvernementales stipulaient que :

Ces orientations ont pour but ultime d’éliminer les rapports de pouvoir et de domination à l’endroit des femmes et des enfants, lesquels sont à l’origine d’un grand nombre d’agressions sexuelles. Elles favoriseront l’atteinte de l’égalité entre les hommes et les femmes et devraient renforcer les attitudes de responsabilité et le respect entre eux ainsi qu’à l’endroit des enfants (Gouvernement du Québec, 2001, p. 12).

Le « but ultime » identifié dans les orientations gouvernementales de 2001 n’est pas rappelé dans le deuxième plan d’action et dans le Rapport sur la mise en œuvre du Plan d’action gouvernemental 2008-2013 en matière d’agression sexuelle. Pour le Conseil, la disparition de ce cadre, de cette perspective est inquiétante. Il fait consensus, parmi tous les spécialistes de la violence envers les femmes, que ce sont les inégalités entre les femmes et les hommes, et les rapports de pouvoir et de domination à l’endroit des femmes et des enfants (filles et garçons) qui sont à l’origine de la violence et qui la perpétuent. Cela doit être rappelé et servir de perspective générale guidant nos actions et nos moyens de lutte.

Le Conseil du statut de la femme se demande également pourquoi le deuxième Plan d’action 2008-2013 ne reprend pas les principaux obstacles rencontrés dans la lutte contre les agressions sexuelles, bien identifiés dans les orientations gouvernementales de 2001. Les 12 principes directeurs définis dans les orientations sont rappelés, ce qui est important. Néanmoins, inscrire les obstacles déjà rencontrés apparaît également essentiel au Conseil puisque cela permet une réflexion en continuité avec le passé, une condition incontournable pour ne pas répéter les erreurs et affronter plus efficacement les difficultés, ainsi que mieux mesurer le chemin parcouru. Le Conseil pense que le gouvernement doit prendre le temps d’évaluer ce qui constitue de bonnes pratiques, de mesurer l’impact des actions entreprises afin de prioriser celles qui sont les plus porteuses pour atteindre le but ultime recherché.

Enfin, le Conseil est perplexe à propos des actions menées dans le premier axe d’intervention, soit la promotion des valeurs fondamentales. Si l’on conçoit que la promotion des rapports égalitaires entre les femmes et les hommes est une valeur fondamentale, elle devrait se retrouver de manière transversale dans tous les axes d’intervention du plan d’action, ce qui n’est pas le cas. Qui plus est, la reconnaissance de cette valeur fondamentale que constitue l’égalité entre les femmes et les hommes devrait s’envisager dans une perspective longitudinale, non seulement au plus jeune âge, mais à toutes les étapes de la vie. Une telle définition de l’approche à adopter face à la violence contre les femmes fait ressortir deux dimensions centrales : la compréhension globale et non fragmentée du phénomène de la violence, et la continuité des actions dans le temps et entre les intervenants.

Les positions, orientations et recommandations du Conseil du statut de la femme en matière de violence faite aux femmes depuis plusieurs années visent entre autres l’adoption d’une approche globale et concertée dans laquelle la prévention est une priorité.

Une politique globale gouvernementale en matière de lutte aux violences faites aux femmes et aux filles

Bien que des orientations solides aient été mises en place (2001) pour lutter contre les agressions sexuelles, le choix du terme « Orientations gouvernementales en matière de lutte aux agressions sexuelles » plutôt que « Politique gouvernementale en matière de lutte aux agressions sexuelles » nous apparaît minimiser la gravité et l’ampleur de ce problème social majeur.

La multiplicité des politiques et des orientations en matière de violence faite aux femmes, et leur fragmentation en autant de plans d’action spécifiques, laissent croire, à tort, que les différentes formes de violence qui s’exercent contre les femmes relèvent de problématiques distinctes. En somme, compartimenter ainsi les violences faites aux femmes occulte la perspective de continuité qui caractérise cette violence : une violence qui peut se vivre à toutes les étapes de la vie des femmes, de l’enfance (inceste, excision, prostitution infantile, mariage forcé) à la vie adulte en passant par l’adolescence (viol, violence du partenaire, harcèlement sexuel, exploitation sexuelle, etc.), plus d’une fois et dans toutes les sphères de leur vie. Les auteurs de violences envers les femmes exercent souvent plus d’une forme de violence à l’endroit de plusieurs femmes et pour les mêmes motifs. Par exemple, comme le souligne Patrizia Romito :

[…] bien qu’un viol soit un viol, les différents types de viol sont présentés comme distincts les uns des autres, et sont étudiés par des spécialistes différents : viol conjugal, viol par des hommes connus, viol par des inconnus, viol à l’occasion de rendez-vous, viol par des prêtres, viol sur de petites filles ou petits garçons, viol collectif en bande (tournante), viol de guerre, viol ethnique… Cette compartimentation masque une évidence terrifiante : celle que toute femme peut être violée par un ou plusieurs hommes dans sa vie (Romito, 2006, p. 148).

Dans son avis sur la violence faite aux femmes produit en 1993, le Conseil soulignait déjà l’importance d’agir globalement et de façon concertée sur les différentes manifestations de violence contre les femmes (CSF, 1993, p. 50). La mise sur pied de la politique d’intervention des ministères de la Justice et de la Sécurité publique qui traitait uniquement de la violence conjugale, lui faisait craindre que soit relégué au second plan le problème des agressions sexuelles, comme d’ailleurs « tous les autres problèmes de violence contre les femmes qui n’ont jamais fait l’objet d’actions gouvernementales soutenues et concertées » (CSF, 1993, p. 50).

Bien que certaines formes de violence contre les femmes et les filles possèdent des caractéristiques qui leur sont propres, le Conseil persiste à croire qu’il est nécessaire de se doter, au Québec, d’un modèle d’intervention global face aux violences vécues par les femmes puisqu’il existe des liens étroits entre les différentes manifestations de cette violence, des racines communes et des conséquences similaires pour les femmes et les filles qui la subissent. Un objectif rassembleur, des orientations communes, des obstacles comparables à surmonter devraient constituer le cœur d’une Politique gouvernementale de lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles. Celle-ci devrait rappeler en premier lieu que les violences faites aux femmes résultent des inégalités persistantes entre les femmes et les hommes.

Puisque l’ensemble des violences faites aux femmes s’inscrivent dans un continuum, le Conseil pense que cette Politique gouvernementale globale devrait viser à prévenir et à contrer toutes les formes de violences faites à toutes les femmes et à toutes les filles ainsi qu’à tous les âges de leur vie.

Les femmes atteintes d’un handicap, les immigrantes récemment arrivées au pays, ou les femmes appartenant à une minorité ethnique et les femmes autochtones subissent souvent, en plus de l’inégalité de pouvoir entre les sexes, des conditions particulières d’isolement et de marginalisation sociale qui accroissent leur vulnérabilité à la violence (CSF, 1993, p. 86).

Une stratégie d’ensemble de lutte contre la violence faite aux femmes et aux filles devrait aussi être clairement élaborée et mettre de l’avant des objectifs et des actions de promotion, de prévention, de législation et de contrôle (répression). Les acquis étant fragiles en matière de lutte à la violence et les défis multiples, il est primordial d’agir sur plusieurs fronts, de manière transversale et dans un esprit de continuité. Concrètement, cela pourrait prendre la forme d’une politique gouvernementale globale de lutte contre les violences faites aux femmes dans laquelle s’inscriraient des plans d’action distincts pour lutter contre certaines formes de violences : violence conjugale, agressions sexuelles, exploitation sexuelle, violences liées à l’honneur, etc.

Le Conseil du statut de la femme recommande que le gouvernement adopte une vision d’ensemble pour mettre fin aux violences commises contre les femmes et les filles en se dotant d’une Politique gouvernementale de lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles basée sur la valeur fondamentale qu’est l’égalité entre les femmes et les hommes.

Une approche concertée

En 1993, le Conseil du statut de la femme soulignait les écueils d’une véritable concertation régionale entre les différents intervenants et les différentes intervenantes issus de différents ministères, organismes ou milieux communautaires dans la lutte contre les différentes formes de violence faites aux femmes. Plus concrètement, il mentionnait alors que « […] le fonctionnement des tables semble […] varier beaucoup d’une région à l’autre ». Et que « certains reprochent aux tables de travailler trop exclusivement sur la question de la violence conjugale et de délaisser les autres formes de violence contre les femmes » (CSF, 1993, p. 52).

Dans le Rapport du second Plan d’action gouvernementale en matière d’agression sexuelle 2008-2013, on observe que les structures de concertation varient encore aujourd’hui selon les régions :

Selon une consultation effectuée auprès des agences [de la santé et des services sociaux (ASSS)] en 2012-2013 sur l’état de la concertation régionale en matière d’agression sexuelle et de la violence conjugale, les structures de concertation prennent différentes formes (tables conjointes ou distinctes en matière d’agression sexuelle et de violence conjugale, tables régionales et locales) et le niveau d’implication des partenaires est variable (Secrétariat à la condition féminine (SCF), ministère de la Justice du Québec (MJQ) et al., 2014, p. 92).

Le Conseil s’interroge à propos du fonctionnement actuel des tables de concertation régionales sur les agressions sexuelles qui étaient sous la responsabilité de l’ASSS (Agence de la santé et des services sociaux). Sont-elles actives dans toutes les régions du Québec? Est-ce que le fait d’avoir dans certaines régions des tables de concertation conjointes en matière de violence conjugale et d’agression sexuelle se ferait au détriment de l’une ou de l’autre des problématiques? En outre, si dans le Rapport du second Plan d’action gouvernementale 2008-2013 en matière d’agression sexuelle, on rapporte que « le niveau d’implication des partenaires est variable » (SCF, MJQ et coll., 2014, p. 92), on peut alors se demander si le mandat des personnes qui siègent à ces tables de concertation a été clairement défini.

Avec la disparition des agences de la santé et des services sociaux, le Conseil se questionne à savoir comment s’articulera à l’avenir la concertation des tables régionales et locales en matière de violence exercée contre les femmes et les filles, mais aussi, quelle sera l’instance qui assumera dorénavant le rôle de coordonner leurs travaux.

Le Conseil du statut de la femme recommande, comme il l’avait fait en 1993, que le gouvernement fasse de la concertation avec tous ses partenaires une véritable priorité en s’appuyant notamment sur l’évaluation des mécanismes de concertation existants. Afin de mesurer les avancées des travaux réalisés au sein des tables de concertation régionales, il apparaît souhaitable pour le Conseil qu’un mandat clair soit donné aux représentants qui y siègent et que des objectifs à atteindre soient encadrés à l’intérieur d’un échéancier à respecter.

Le Conseil recommande de mettre en place des tables de concertation régionales sur la violence faite aux femmes et aux filles qui regrouperaient l’ensemble des formes de violences qui s’exercent contre elles : violence conjugale, agressions sexuelles, cyberviolence, violence en milieu de travail, exploitation sexuelle violence liée à l’honneur, etc. avec, autour de ces tables, les mêmes représentants, quelles que soient les formes de violence abordées.

Ampleur et prévalence de la violence faite aux femmes et aux filles

Du point de vue du Conseil du statut de la femme, les enquêtes de victimisation – par comparaison aux données policières utilisées dans le portrait statistique – comportent certains biais et limites dans la mesure de la prévalence de la violence. D’une part, ces enquêtes reposent uniquement sur la perception des personnes interrogées et, d’autre part, elles ne permettent pas de connaître le contexte dans lequel s’exerce la violence.

Le Conflict Tactics Scales (CTS) (Strauss, 1979) est un des questionnaires les plus connus et les plus souvent utilisés pour réaliser les enquêtes de victimisation sur la violence conjugale et les agressions sexuelles, notamment en Amérique du Nord, incluant au Québec et au Canada (Damant et Guay, 2005, p. 127).

Sous sa forme originale, le CTS est constitué de 19 énoncés, […]. L’instrument est présenté aux répondants comme une enquête sur la résolution des conflits dans le couple. Le texte de présentation met l’accent sur le caractère courant des situations mesurées, invitant les répondants-es à indiquer des choses qui ont pu se produire à des moments où des partenaires sont en désaccord, ennuyés l’un par l’autre, veulent des choses différentes l’un de l’autre, ou ont simplement des prises de bec parce qu’ils sont de mauvais poil, fatigués ou pour toute autre raison (Damant et Guay, 2005, p. 127).

Certaines études sur la violence dans le couple, réalisées notamment chez les jeunes, révèlent que les hommes et les garçons seraient tout autant victimes de violence conjugale que les femmes et les filles. Cependant, ces résultats sont démentis par les données policières, lesquelles indiquent que les femmes sont plus nombreuses à être victimes de violence conjugale que les hommes (14 981 comparativement à 3 904 en 2013) (MSP, 2015b, p. 12).

Dans le cas des agressions sexuelles, les chiffres les plus récents publiés par le MSP rapportent que 4 477 femmes ont été victimes d’agression sexuelle en 2013 comparativement à 941 hommes (MSP, 2015a, p. 14).

L’Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire 2010-2011 (EQSJS) (Tome 2) (ISQ, 2013) a utilisé une version adaptée du CTS pour réaliser cette enquête qui portait, entre autres, sur la violence dans les relations amoureuses chez les jeunes du secondaire. Les données ont révélé un taux de violence physique infligée par les filles plus important (19 %) que chez les garçons (6 %) (ISQ, 2013, p. 102). Toutefois, il est intéressant de noter que les auteurs de cette étude mettent en garde les lecteurs quant aux limites du CTS et à l’interprétation que l’on peut faire de ces résultats :

Le Conflict Tactics Scale (CTS) […] ne permet pas de mesurer l’intention ni l’impact des gestes posés pour se défendre plutôt que pour agresser. Il est également impossible de distinguer la gravité de ces gestes. Les garçons auraient tendance à sous-déclarer, à nier ou à minimiser leurs actes de violence envers les filles, tandis que ces dernières seraient plus portées à surdéclarer le phénomène, à accepter le blâme ainsi que la responsabilité d’avoir suscité la violence (cité dans Powers et Kerman, 2006). Il est possible aussi que les garçons, en tenant compte de leur force et de l’impact de leurs gestes, s’abstiennent d’infliger de la violence physique, tandis que les filles n’hésitent pas à agir, sachant qu’elles ne peuvent pas faire trop de mal. En fait, mentionnons que comparativement aux garçons, il semble que les filles subissent plus de blessures qui nécessitent une intervention médicale comme conséquence des gestes de violence subie dans leurs relations amoureuses (ISQ, 2013, p. 107).

L’utilisation du CTS ne fait pas l’unanimité chez les chercheurs, dont certains lui reprochent de ne pas mesurer la fréquence, la gravité et les conséquences de la violence subie, ni tenir compte du contexte dans lequel cette violence est infligée (autodéfense, contrôle, domination) (dans INSPQ, page consultée le 21 janvier 2015b).

À chaque fois qu’il est question de violence, on voit resurgir le débat entourant la symétrie de la violence exercée contre les femmes et contre les hommes. Le sociologue américain Michael P. Johnson, nous invite à aller au-delà du débat d’ordre méthodologique pour revoir, sous un autre angle, l’interprétation des données quantitatives fournies par les enquêtes de victimisation. Pour ce faire, il a émis l’hypothèse qu’il existerait différents types de violence conjugale: le terrorisme conjugal, la résistance violente (violence pour se défendre) et la violence situationnelle au sein du couple. Selon lui, les deux premiers types de violence « […] prennent leur source dans les questions de pouvoir et de contrôle et le troisième, dans les dynamiques de gestion de conflits » (Johnson, 2014, p.18). Alors que les deux premières formes de violence conjugale correspondraient à une tentative pour contrôler la relation, la violence situationnelle de couple serait liée à des situations particulières, par exemple à une dispute qui dégénère. Selon les chiffres disponibles, « le terrorisme intime serait perpétré principalement par les hommes, la résistance violente par les femmes et la violence situationnelle, à peu près autant par les hommes que par les femmes » (Johnson, 2014, p. 22).

Ces distinctions proposées par Johnson, en plus de permettre de mieux comprendre la nature de la violence conjugale, suggèrent que les interventions réalisées auprès des agresseurs et des victimes pourraient varier selon le type de violence exercée (Johnson, 2014, p. 25). Cela pourrait ouvrir de nouvelles perspectives non seulement pour la recherche, mais également pour l’intervention. Dans un article publié en 2013, la sociologue française Catherine Cavalin, souligne l’importance de poursuivre la réflexion sur la distinction entre violence et conflit. Elle précise que : « La recherche est ici celle d’une analyse plus qualitative des situations de violence (de l’ordre de celle qu’opère Johnson), à fonder sur les résultats quantitatifs » (Cavalin, 2013, p. 74).

Sans nier l’existence de violences exercées par des femmes contre des hommes, le Conseil du statut de la femme considère que les enquêtes de victimisation, telles qu’utilisées actuellement, tendent à favoriser l’amalgame de différentes formes de violences qui ne sont pas comparables, notamment celles commises pour se défendre et celles commises pour dominer une autre personne. Dans le contexte d’une réflexion sur ses propres politiques et sur leur efficacité, il apparaît au Conseil du statut de la femme que le gouvernement devrait se doter de moyens plus efficaces d’évaluer et de mesurer régulièrement, et le plus précisément possible, les violences faites aux femmes et aux filles, afin de pouvoir analyser l’évolution de l’ampleur et des caractéristiques du phénomène. La rigueur avec laquelle sera évalué, dans ce cas précis, le nombre d’agressions sexuelles perpétrées contre les femmes et les filles, permettra de concevoir des politiques en lien avec la réalité observée.

Le Conseil du statut de la femme préconise de mettre au point des instruments de collecte de données quantitatives et qualitatives sur les différentes formes de violence.

Prioriser la prévention dans le prochain Plan d’action

En 2001, les orientations gouvernementales précisaient que, pour réduire l’incidence des agressions sexuelles et augmenter le taux de dénonciation, il faut combattre en priorité les mythes et les croyances entourant les agressions sexuelles :

Des conceptions stéréotypées sur le comportement des femmes et les agressions à caractère sexuel sont encore véhiculées dans la société québécoise. Une forte proportion de la population croit que les femmes acceptent d’avoir des rapports sexuels et se plaignent ensuite d’avoir été agressées; que les femmes sont ambivalentes et que, quand elles disent non, elles veulent dire oui; que les femmes provoquent les agressions sexuelles par leurs attitudes et comportements; que les femmes et les enfants sont généralement agressés par des étrangers; que les agresseurs sexuels sont tous des « malades mentaux » etc. […].

Ces […] croyances cautionnent les différentes formes d’agression sexuelle commise à l’endroit des femmes et des enfants et entravent l’adoption, par l’ensemble de la société, de valeurs telles que le respect de l’intégrité physique et psychologique de toutes les personnes. Elles permettent de justifier ou de mettre en doute la réalité des agressions sexuelles que subissent les femmes et les enfants, tout en détournant l’attention de la population quant à l’entière responsabilité des agresseurs sexuels. Ces mythes, préjugés et stéréotypes banalisent cette forme de violence et en atténuent le caractère criminel. (Gouvernement du Québec, 2001, p. 40).

Pour le Conseil, le libellé de ce texte tiré des orientations gouvernementales de 2001 demeure d’actualité. En effet, des données récentes obtenues dans le cadre d’une enquête réalisée auprès de la population étudiante7 d’Ottawa (2015) révèlent que ces mythes et ces croyances sont toujours bien vivants. Bien que la majorité des étudiants était en désaccord « avec les énoncés qui minimisent le harcèlement et qui tiennent les femmes responsables de la violence sexuelle », les auteurs ont relevé des proportions significatives d’étudiants qui se disaient en accord ou neutre avec certains énoncés. Par exemple :

Pour toutes ces affirmations, la proportion des étudiants qui se disaient en accord était plus élevée que pour les étudiantes. Les auteurs de cette enquête rappellent les impacts que peuvent avoir ces croyances sur la violence sexuelle :

Ces croyances sont préjudiciables parce que les recherches démontrent qu’elles sont en corrélation avec la perpétration réelle de la violence sexuelle et parce qu’elles aident à créer un environnement où les femmes sont considérées comme des cibles légitimes de la violence sexuelle (Université d’Ottawa, 2015, p.: 13).

Travailler sur les croyances entourant la violence et la sexualité ne peut se faire en vase clos. La prévention doit porter également sur les inégalités de sexe en général et les changements structurels importants nécessaires pour les réduire en particulier. Pourtant, dans le Plan d’action 2008-2013, on ne retrouve nulle part dans les actions menées auprès de jeunes, des initiatives qui visent à développer un regard critique sur les inégalités, et à mieux comprendre ce qui produit ces inégalités. Il est abondamment question de lutte aux stéréotypes, aux images sexualisées, à l’hypersexualisation, mais rien sur les inégalités qui sont responsables de ces manifestations stéréotypées des hommes et des femmes. Il ne faut pas oublier que ce sont les inégalités qui produisent les stéréotypes et non le contraire. De l’avis du Conseil, il n’est pas suffisant de s’attaquer aux manifestations des rapports inégalitaires de sexe que sont les stéréotypes, il faut aussi donner les moyens aux jeunes et aux adultes de comprendre pourquoi, malgré certaines avancées, les inégalités perdurent et que les femmes en paient encore le prix à tous les âges et dans toutes les sphères de leur vie. La violence exercée contre elles en est un exemple manifeste.

Une campagne grand public

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande que la prévention de la violence à l’égard des femmes et des filles soit considérée comme hautement prioritaire dans les politiques nationales, dans les pays industrialisés comme dans les pays du Sud (World Health Organisation, page consultée le 20 mars 2015, p. 91). En ce sens, les campagnes de sensibilisation destinées à une large population constituent un élément important d’un projet de prévention en vue de changer les attitudes, notamment pour mettre un terme au secret qui pèse sur ce phénomène et pour affirmer clairement que cette violence ne sera tolérée d’aucune manière dans notre société.

Hormis des campagnes gouvernementales ponctuelles sur la violence conjugale ou les agressions sexuelles, et quelques initiatives régionales trop souvent éphémères, la prévention structurée de la violence faite aux femmes et aux filles est peu développée. Dans le Plan d’action gouvernemental pour l’égalité entre les femmes et les hommes 2011-2015, il était prévu de diffuser à travers le Québec une campagne de promotion des rapports égalitaires destinée au grand public. Malheureusement, il semble que cette campagne ne verra pas le jour avant la fin de l’année 2015.

Le Conseil du statut de la femme recommande qu’une campagne gouvernementale de promotion des rapports égalitaires destinée au grand public soit menée et que celle-ci inclue dans son plan de communication des actions concertées en région qui viendraient relayer le message national sur l’égalité.

Travailler avec les hommes et les garçons

Dans son Recueil des bonnes pratiques pour combattre les violences faites aux femmes, l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) (Seftaoui, 2009), souligne l’importance de mobiliser les hommes et les garçons dans les efforts menés pour prévenir la violence contre les femmes et les filles. Les hommes sont en effet, à la fois responsables de la violence faite aux femmes et aux filles, et porteurs de changement :

Un principe directeur des pratiques qui se penchent sur les violences faites aux femmes est qu’elles ciblent les hommes. Les programmes qui portent sur les hommes vont de ceux qui reconnaissent la responsabilité de l’homme en tant qu’auteur de la violence, établissent des poursuites et des mesures de traitement appropriées, à ceux qui engagent des hommes non-violents en tant que modèles de rôle constructif, en tant que militants de la prévention contre les violences faites aux femmes et en tant qu’avocats de l’égalité des sexes dans toutes les sphères. (Seftaoui, 2009, p. 28).

Dans un premier temps, le travail de prévention ciblant les hommes et les garçons doit mettre de l’avant la reconnaissance que la violence exercée contre les femmes et les filles « […] résulte de leur socialisation, des normes culturelles, de la définition donnée à la masculinité et de l’histoire des rôles assignés à chacun des sexes » (Seftaoui, 2009, p. 69). Évidemment, tous les hommes ne commettent pas des actes de violence, mais pour être porteur de changements positifs, chacun doit se sentir concerné par la violence exercée par d’autres personnes du même sexe.

Dans le Plan d’action 2008-2013 gouvernemental en matière d’agression sexuelle, l’un des objectifs pour être en mesure de rencontrer les engagements en matière de prévention était : « Expérimenter et évaluer des programmes de prévention qui s’adressent spécialement aux adolescents et aux jeunes hommes […] » (Gouvernement du Québec, 2008, p. 48). Pourtant, à la lecture du Rapport, aucune mesure spécifique destinée à la prévention de la violence sexuelle auprès de garçons, ne semble avoir été réalisée. Aussi, on apprend dans le Rapport sur la mise en œuvre du plan d’action que la mesure consacrée à soutenir le développement d’outils d’évaluation validés et adaptés à l’âge et la mise en place de programmes d’interventions reconnus pour, entre autres, les adolescents présentant des comportements sexuels problématiques n’a pu être développée, « compte tenu des ressources humaines et financières disponibles » (Gouvernement du Québec, 2014, p. 86).

Les garçons sont habituellement plus réticents à participer aux activités de prévention et n’y réagissent pas de la même manière que les filles. Faire appel à des intervenants masculins pour approcher les garçons et les inviter à participer à des ateliers de prévention en matière de violence dans les relations amoureuses semble être perçu comme étant un facteur de réussite8. À cet égard, il serait pertinent de documenter et d’évaluer les pratiques d’intervenants masculins auprès de garçons, en particulier dans les activités de prévention de la violence dans les relations amoureuses, afin de permettre une meilleure articulation avec les interventions féministes auprès des femmes et des filles victimes de violence.

Les données québécoises sur la violence sexuelle exercée par les garçons sont inquiétantes. Selon l’Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire 2010-2011 (EQSJS), il existe peu d’informations récentes disponibles au sujet des agressions à caractère sexuel chez les jeunes (ISQ, 2013, p. 108). Toutefois, les données de l’EQSJS 2010-2011 révèlent que 6 % des jeunes, filles et garçons, de 14 ans et plus qui fréquentent le secondaire ont déclaré avoir été forcés à avoir une relation sexuelle, 4,2 % l’ayant été de la part d’un autre jeune. Les filles sont proportionnellement beaucoup plus nombreuses à être victimes de ce genre d’agression que les garçons (environ 10 % comparativement à 2,3 %) (ISQ, 2013, p. 108). Les auteurs de l’Enquête précisent que, bien que ces pourcentages puissent apparaître plus faibles que pour les autres formes d’agressions, il faut rappeler que les agressions sexuelles sont « la plupart du temps passées sous silence ». Une étude pancanadienne réalisée à partir des données policières révèle que, sur cinq agressions sexuelles déclarées, une est commise par un adolescent, bien que ce groupe d’âge ne représente que 10 % de la population canadienne (Statistique Canada, 2003 dans Viens, Tourigny, Lagueux et Loméga, 2011, p. 308). Il importe donc de développer des actions de prévention directement destinées aux garçons et aux jeunes hommes.

Dans la perspective d’une approche globale en prévention des agressions sexuelles, des chercheures membres du Centre de recherche interdisciplinaire sur les problèmes conjugaux et les agressions sexuelles (CRIPCAS), recommandent que […] les efforts de prévention, inspirés des meilleures pratiques auprès des enfants et des adolescents intégrés à l’éducation à la sexualité, s’adressent non seulement aux victimes potentielles, mais également aux agresseurs potentiels (Daigneault, Collin-Vézina et Hébert, 2012, p. 22).

Dans la perspective d’une approche globale en prévention des agressions sexuelles, le Conseil du statut de la femme recommande que les interventions destinées aux enfants et aux adolescents inspirées des meilleures pratiques s’adressent non seulement aux victimes potentielles, mais également aux agresseurs potentiels.

Dans un deuxième temps, le travail de prévention ciblant les hommes et les garçons doit faire des hommes et des garçons non-violents des acteurs de premier plan en tant qu’agents de changement. Afin de pouvoir exercer ce rôle, les hommes et les garçons doivent avoir l’occasion de réfléchir de façon critique aux mécanismes sociaux responsables de la reproduction de la violence masculine contre les femmes. Aussi, les hommes doivent servir de modèles à leur fils, au quotidien, dans leurs gestes, mais aussi dans leurs propos sur la violence qui est faite aux femmes et sur les inégalités entre les sexes.

Par exemple, Simon Lapierre9, professeur agrégé à l’École de service social de l’Université d’Ottawa, publiait en décembre 2014 une lettre à son fils qui nous invite à réfléchir sur la posture que les hommes et les garçons peuvent adopter pour amorcer leur réflexion et leurs actions dans la lutte contre la violence faite aux femmes. Une lettre éclairante et inspirante. En voici quelques extraits :

« […] faire partie d’un groupe privilégié ne nous protège pas contre les défis et les difficultés. Cependant, malgré ceux-ci, le simple fait que tu sois un homme te donnera accès à plusieurs privilèges auxquels les femmes n’ont pas accès - ou ont plus difficilement accès. La liste est longue... Parce que tu es un homme, tu seras moins à risque d’être victime de violence sexuelle ou de violence conjugale, tu auras moins peur d’être attaqué lorsque tu te promèneras seul le soir, on t’écoutera davantage, tu seras plus susceptible d’occuper un poste de pouvoir, d’être payé davantage pour un emploi équivalent, etc. […].

[…] Par ailleurs, par souci d’égalité, de justice sociale et de solidarité, nous devons nous interroger à savoir si certains de nos comportements contribuent à maintenir ces inégalités et si nous pourrions faire davantage d’efforts pour dénoncer ou contrer les injustices. Ces efforts peuvent être individuels, mais ils doivent aussi être collectifs. […] ».

La Réunion du groupe d’experts sur le rôle des hommes et des garçons dans la réalisation de l’égalité entre les sexes (réuni par la Division pour la promotion des femmes des Nations-Unies) (2003), ainsi que plusieurs autres instances internationales, sont unanimes pour affirmer :

« le besoin d’intégrer les hommes et les garçons dans la remise en question des normes sexospécifiques [attentes sociales concernant les rôles et les comportements propres aux femmes et aux hommes] et inégalitaires dominantes […] » (Baker, Ricardo et Nascimento, 2007, p. 3).

Dans une publication réalisée en 2007, l’OMS a évalué l’efficacité des programmes cherchant à inclure les hommes et les garçons dans la réalisation de l’égalité de genre dans le domaine de la santé, notamment en matière de violence à l’égard des femmes. Leurs conclusions révèlent que :

Le Conseil du statut de la femme recommande que la question de l’implication des hommes et des garçons en matière de violence contre les femmes et les filles fasse l’objet de plus amples réflexions et concertations pour que la prévention de la violence soit portée non seulement par les femmes et les institutions sociales, mais aussi par les hommes et les garçons eux-mêmes.

Prévention auprès des jeunes

Éducation à la sexualité

Une grande partie de l’opinion publique, des politiciens, du personnel du milieu scolaire, des parents, des sexologues, des chercheurs et des jeunes eux-mêmes reconnaissent l’importance d’une éducation en matière de sexualité à l’école.

Dans le Plan d’action gouvernemental pour l’égalité entre les femmes et les hommes 2011-2015, il est mentionné que le ministère de l’Éducation, du Loisir et des Sports en collaboration avec ses partenaires, devait : « Mettre en place chaque année, pour les élèves de l’éducation préscolaire jusqu’à la fin de l’enseignement secondaire, des apprentissages en éducation à la sexualité de façon obligatoire » (Gouvernement du Québec, 2011, p. 35).

Il y était même affirmé que :

Dès septembre 2012, le réseau scolaire offrira aux élèves des apprentissages obligatoires en matière d’éducation à la sexualité annuellement, et ce, de l’éducation préscolaire jusqu’à la fin de l’enseignement secondaire. La nouvelle formule prévue permettra d’assurer une éducation à la sexualité qui tienne compte de l’âge et du niveau de développement des élèves et s’inscrira en cohérence avec les recommandations de la recherche quant à l’éducation à la sexualité à offrir aux enfants et aux adolescentes et adolescents.

Les apprentissages faits permettront notamment d’aborder la sexualité sous l’angle des rapports égalitaires entre les filles et les garçons (Gouvernement du Québec, 2011, p. 35).

En 2015, ces apprentissages obligatoires en matière d’éducation à la sexualité ne sont toujours pas implantés dans les écoles du Québec. En septembre dernier, une pétition signée par 5 762 pétitionnaires a été déposée à l’Assemblée nationale pour que soit mis en place « des cours spécifiques d’éducation à la sexualité dans une perspective de rapports égalitaires, non sexistes et non hétéros sexistes ». En octobre, la Commission de la culture et de l’éducation a décidé d’étudier la pétition et a fourni un rapport au terme de ses travaux en novembre 2014. À la suite des recommandations formulées dans ce rapport, le ministre de l’Éducation confirme « que le Ministère poursuivra les travaux dans le sens des propositions faites lors des audiences tenues le 21 octobre dernier et qu’un suivi sera effectué auprès de la Commission au terme de l’implantation du projet-pilote ». Ce projet-pilote visant l’encadrement de l’éducation à la sexualité dans les écoles québécoises « est en cours d’élaboration au ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport et qu’il doit être implanté dans certaines écoles au cours du printemps 2015 » (Assemblée nationale du Québec, Commission de la culture et de l’éducation 2014, p. 2). Pour la réalisation de ce projet-pilote, le ministre souligne que: « les différents acteurs du réseau scolaire, dont les enseignants, seront consultés […] ».

À l’heure actuelle, les contenus offerts dans les écoles du Québec en matière d’éducation à la sexualité sont disparates et dispensés par des personnes qui possèdent des formations diverses et qui s’avouent plus ou moins à l’aise avec ces contenus.

Au Canada, il n’existe pas de normes régissant la surveillance et l’évaluation des programmes d’éducation à la sexualité. Le Québec n’est pas la seule province où l’éducation à la sexualité est absente des curriculums scolaires. En Alberta, certaines commissions scolaires autorisent des groupes religieux à offrir l’éducation à la sexualité. Pour l’ensemble des provinces, les contenus des apprentissages portent principalement sur la santé sexuelle, selon un modèle d’intervention « préventif » : prévention des ITSS, la contraception, la prévention de la grossesse, etc.

Dès septembre 2015, l’Ontario offrira un tout nouveau projet d’éducation à la sexualité qui sera intégré au programme scolaire dès la 7e année. En 2010, ce programme était déjà prêt à être implanté, mais le gouvernement libéral ontarien de l’époque avait dû reculer face aux pressions exercées par les groupes religieux. Aujourd’hui, ce programme, qualifié d’avant-gardiste, propose aux élèves de s’informer et de réfléchir sur de nombreux sujets, jusqu’à maintenant peu abordés dans ce type de programme, tels que le consentement sexuel, la cyberintimidation, les pratiques sexuelles et même la diversité de genre.

Il existe ailleurs dans le monde des modèles performants qui intègrent la sexualité dans leur programme scolaire. Par exemple, aux Pays-Bas les enfants entendent parler de la sexualité dès l’âge de cinq ans. « On n’enseigne pas la sexualité, on en parle », telle est la devise du ministère de l’Éducation des Pays-Bas. Aux Pays-Bas et en Suède, les fondements de l’éducation à sexualité reposent sur une vision globale et positive de la sexualité. Ce modèle d’intervention que l’on qualifie de « modèle intégratif » (Boucher, 2012, p. 28) reflète le haut niveau d’ouverture dont fait preuve la population de ces pays à l’égard de la sexualité en général et de la sexualité adolescente en particulier.

Bien que les acteurs du milieu scolaire soient concernés au premier chef par cette question, le Conseil souhaiterait que le milieu de la recherche soit aussi convié à participer à cette consultation, notamment, pour que le point de vue des adolescentes soit davantage considéré pour la compréhension et l’analyse des phénomènes étudiés qui les touchent, mais aussi pour que la question de la sexualité soit réinsérée dans celle, plus vaste, des inégalités entre les sexes.

La sexualité des adolescentes est une source d’inquiétude pour les parents, les chercheurs et la société en général (Lang, 2013, p. 39). En effet, au Québec comme ailleurs, la « santé sexuelle » des adolescentes est au cœur de plusieurs programmes d’intervention. Il y est question de sexualité précoce, d’infections transmises sexuellement et par le sang (ITSS), d’hypersexualisation, de grossesse à l’adolescence, d’avortement, de violence dans les relations amoureuses des jeunes, etc. La sexualité des adolescentes est, comme l’estiment certaines chercheures, traitée comme étant une « sexualité-problème » (Boucher, 2012, p. 19, Boucher, 2003, p. 128 , Caron, 2009, p. 17) qu’il faut à tout prix contrôler et encadrer.

Le Conseil croit qu’il est important que l’éducation à la sexualité ne soit pas uniquement axée sur la prévention des risques, mais qu’elle porte aussi sur d’autres sujets, tels que: les relations interpersonnelles (gestion des conflits, etc.), le consentement, le désir, le plaisir, l’amour, l’intimité et bien entendu, la compréhension des normes sociales dominantes qui régissent la sexualité. Il importe aussi pour le Conseil que la sexualité soit abordée de manière plus positive et que le discours privilégié par les adultes encourage les filles et les garçons à s’exprimer en dehors d’une conception de la sexualité essentiellement basée sur les différences biologiques. Une vision qui conduit à opposer et à hiérarchiser les rapports entre les sexes au détriment des femmes. Il faut rappeler ici que cette vision naturaliste est toujours très présente dans le discours populaire et chez les jeunes (Bouchard et St-Amant 1996, p. 221-226) et demeure bien vivante dans les représentations et les pratiques de la sexualité (Bajos, Ferrand et Andro, 2008, p. 547). Cela n’est pas sans conséquence, notamment dans les relations amoureuses des jeunes. En effet, le naturalisme suggère que l’agressivité est naturelle et qu’elle trouve sa source dans les hormones sexuelles mâles, indispensables à la survie de l’espèce. De l’avis des chercheurs, « le recours à la violence, incluant la violence sexuelle, en est une manifestation et s’expliquerait par une perte de contrôle des individus plutôt que par l’exercice du pouvoir des hommes sur les femmes » (Bouchard et St-Amant, 1996, p. 222). Ainsi, « les «désirs sexuels incontrôlables» servent […] à justifier des comportements d’agressions sexuelles » (Gauvin, 1995 dans Bouchard et St-Amant, 1996, p. 222).

Pour le Conseil, les perceptions relatives à l’égalité entre les femmes et les hommes portées par les jeunes reflètent la complexité de l’environnement dans lequel ils évoluent, mais aussi leurs préoccupations, leurs aspirations et leurs rêves. Il y a urgence d’entendre et de considérer la parole des jeunes sur les enjeux de l’égalité entre les femmes et les hommes et poursuivre le dialogue (CSF, 2009, p. 34).

À cet égard, la vision des adolescentes et des adolescents sur ce que devraient être des rapports égalitaires en matière de sexualité pourra venir enrichir le débat sur ces questions.

Au sujet de l’éducation à la sexualité dans les écoles, le Conseil du statut de la femme recommande :

Prévention et intervention précoce dans les cégeps et les universités

Une des mesures prévues dans le dernier plan d’action en matière d’agression sexuelle visait à inventorier les activités de prévention et d’intervention précoce en matière d’agression sexuelle dans les cégeps et les universités « afin de favoriser un partage d’expertise à travers les réseaux et publier un guide des meilleures pratiques dans les réseaux et dans Internet » (Gouvernement du Québec, 2014, p. 59).

Le rapport nous apprend qu’en 2008, la plupart des établissements d’enseignement supérieur possédaient un plan d’action en matière de harcèlement sexuel, mais aucun pour prévenir les agressions sexuelles. Bien qu’il ait identifié quelques « initiatives intéressantes », en 2008, le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science (MESRS), responsable de cette mesure, a évalué « après analyse » que la meilleure mesure à mettre en place était de produire et de diffuser un guide pour sensibiliser les réseaux collégial, public et privé ainsi que les universités à la problématique des agressions sexuelles (Les agressions sexuelles existent et marquent profondément).

Bien que l’idée de produire un document de sensibilisation aux agressions sexuelles soit intéressante, un guide des meilleures pratiques pour prévenir et contrer les agressions sexuelles nous apparaît encore plus pertinent, notamment en raison de la portée potentielle que pourrait avoir un tel guide dans le contexte actuel. De l’avis du Conseil, il aurait donc été utile de connaître les résultats de la recherche menée par le MESRS ainsi que les initiatives jugées intéressantes et porteuses de changements positifs.

En effet, les cégeps et les universités doivent se pencher sérieusement sur la question des violences sexuelles exercées contre les étudiantes dans leurs établissements et prendre les moyens pour les prévenir et les contrer. On estime qu’entre 15 % et 25 % des femmes en âge de fréquenter le collège ou l’université en Amérique du Nord subiront une forme d’agression sexuelle pendant leurs études (Lichty et al, 2008, p. 6, dans Direction générale de la condition féminine de l’Ontario, 2013, p. 1).

Au Québec, comme ailleurs au Canada, les exemples ne manquent pas illustrant la culture du viol qui règne sur plusieurs campus. À la rentrée de 2013, dans le stade de l’Université Saint Mary’s à Halifax, 400 étudiants ont entonné en chœur: « Les filles, on les aime jeunes, mineures et non consentantes! Voilà qui pourrait nous valoir la prison! ». Au début 2014, l’Université d’Ottawa se retrouvait à son tour sur la sellette avec la dénonciation, par la présidente de la fédération étudiante, de propos dégradants à son sujet tenus par ses collègues masculins sur les médias sociaux et avec des accusations d’agression sexuelle portées contre les membres de l’équipe de hockey de l’établissement. Aussi, depuis plusieurs années, dans le cadre des activités d’initiation, les étudiants en droit de l’Université Laval, entament en chœur une chanson grivoise dont les paroles crues et dégradantes incitent à la violence sexuelle contre les étudiantes (Parent, 2014). En 2014, la présidente du Conseil du statut de la femme a fait parvenir ses commentaires à la doyenne de la Faculté de droit de l’Université Laval pour dénoncer cette pratique qu’elle a qualifiée de sexiste et de violente à l’égard des femmes10. Au Québec, dans la foulée des évènements dénoncés, certaines universités (Concordia11, McGill, UQAM) ont mis en place des mesures de prévention, dont des ateliers sur le consentement éclairé, destinés aux étudiants. Toutefois, la plupart des universités canadiennes n’ont pas de politique pour prévenir et contrer les agressions sexuelles sur leurs campus.

En Ontario, le gouvernement a réalisé en 2013 un guide des ressources pour les collèges et les universités de l’Ontario afin qu’ils interviennent davantage pour prévenir la violence sexuelle sur leurs campus. De l’avis du gouvernement ontarien :

Les politiques et protocoles d’intervention officiels peuvent jouer un rôle essentiel dans la création d’un milieu où chaque personne sur le campus comprend que la violence à caractère sexuel est inacceptable, où les survivantes reçoivent les services dont elles ont besoin et où les agresseurs sont tenus responsables de leurs crimes. Combiné aux activités d’éducation et de sensibilisation, les politiques et protocoles officiels peuvent grandement contribuer à augmenter la sécurité sur les campus (Direction générale de la condition féminine de l’Ontario, 2013, p. 1).

Ce guide tire son origine du Plan d’action de l’Ontario contre la violence sexuelle mis en place en 2011. Fait intéressant, dans le Rapport d’étape de son Plan d’action (2013), il est précisé que le ministère de la Formation et des Collèges et Universités «[…] continue d’accorder chaque année aux collèges et universités une subvention pour la sécurité des femmes sur les campus […] ».

Le message du gouvernement de l’Ontario est clair : « […] Nous ne tolérons pas la violence à caractère sexuel dans nos collectivités. Nous ne tolérerons pas la violence à caractère sexuel sur les campus » (Direction générale de la condition féminine de l’Ontario, 2013, Message des ministres).

Pour le moment, on ignore combien d’établissements utilisent ce guide des ressources qui recommandait des mesures pour prévenir les agressions sexuelles et un protocole d’intervention. Toutefois, dans le tout nouveau plan d’action pour lutter contre la violence sexuelle présenté par la première ministre de l’Ontario le 6 mars 2015, il est indiqué que le guide Intervenir contre la violence à caractère sexuel : Guide des ressources pour les collèges et universités de l’Ontario « sera révisé et mis à jour régulièrement » (Gouvernement de l’Ontario, 2015, p. 28).

Dans le tout nouveau plan d’action pour lutter contre la violence sexuelle de 2015, les recommandations destinées à contrer la violence sexuelle sur les campus vont encore plus loin. En effet, des étudiantes et étudiantes ont travaillé étroitement avec la première ministre de l’Ontario, le ministère de la Formation et des Collèges et Universités et la Direction générale de la condition féminine de l’Ontario pour élaborer ces recommandations. En outre, les Collèges de l’Ontario et le Conseil des universités de l’Ontario ont également été conviés à ces échanges, afin que des politiques et des mesures institutionnelles pour prévenir et contrer le problème de la violence sexuelle soient mises en place sur les campus.

Selon la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants, les huit premières semaines de cours représentent une période à plus grand risque d’agression sexuelle sur les campus. À cet égard, le plan d’action ontarien de 2015 prévoit que « tous les collèges et toutes les universités participeront à une campagne de sensibilisation de portée provinciale en septembre 2015 » (Gouvernement de l’Ontario, 2015, p. 27).

Le gouvernement ontarien dénonce la culture du viol qui sévit trop souvent sur les campus :

Nous voulons éliminer la culture du viol sur les campus. Nous voulons des milieux d’apprentissage sécuritaires et respectueux. Nous souhaitons que toutes les étudiantes et tous les étudiants de chaque université et collège de l’Ontario puissent étudier, acquérir des connaissances et profiter pleinement de la vie de campus, sans subir ni violence ni harcèlement à caractère sexuel (Gouvernement de l’Ontario, 2015, p. 27).

Pour y parvenir, le gouvernement ontarien mettra en œuvre les actions suivantes :

Le modèle ontarien en matière de violence et de harcèlement à caractère sexuel

En 2011, l’Ontario se dotait de son premier plan d’action en matière d’agression sexuelle, Changer les attitudes, changer les vies : Plan d’action de l’Ontario contre la violence à caractère sexuel doté d’un budget de 15 millions de dollars sur quatre ans. Ce premier plan d’action a été élaboré par la Direction générale de la condition féminine de l’Ontario, en collaboration avec différents ministères, des spécialistes des secteurs communautaires, de la santé, de l’éducation et de la justice et la participation de plus de 350 victimes d’agression sexuelle.

Dans la foulée de ce plan d’action, la Direction générale de la condition féminine de l’Ontario organisait un forum de consultation réunissant près de 200 professionnelles et professionnels impliqués dans la prévention de la violence sexuelle. Cette vaste consultation devrait donner naissance à une campagne multimédia interactive intitulée Traçons-les-limites, destinée au public. L’utilisation d’exemples concrets pour illustrer les notions de consentement, des situations de harcèlement sexuel ou d’agression sexuelle aident le public à mieux déterminer quand et comment « tracer ses limites ». Viennent aussi se greffer à cette campagne provinciale de nouvelles initiatives pour rejoindre des besoins spécifiques ou des clientèles particulières, y compris les femmes autochtones, les jeunes femmes sur les campus et les femmes âgées. Cette campagne cible également les hommes et les garçons en les invitant à s’engager activement dans la prévention de la violence exercée contre les femmes et les filles.

En mars 2015, la première ministre de l’Ontario dévoile le second plan d’action en matière d’agression sexuelle intitulé Ce n’est jamais acceptable: Plan d’action pour mettre fin à la violence et au harcèlement sexuels. Le budget pour sa réalisation s’élève à 41 millions sur trois ans.

Les faits saillants du plan d’action de 2015

Dépôt d’un projet de loi pour renforcer les dispositions relatives à la violence sexuel et au harcèlement, dans les milieux de travail, sur les campus, dans le milieu familial et dans les procédures de poursuites civiles.

Vaste campagne de sensibilisation et d’éducation grand public dont l’objectif est d’encourager une remise en question des mythes et croyances sur la violence sexuelle tout en proposant aux personnes, qui côtoient les femmes et les filles, de développer les compétences nécessaires pour passer à l’action.

Évaluation des progrès et des résultats et production d’un rapport un an après la mise en œuvre du plan d’action.

Tenue d’un Sommet provincial sur la violence et le harcèlement à caractère sexuel dès l’automne 2015.

Mise en place d’une communauté de pratiques réunissant des membres des organisations policières, de l’appareil judiciaire et des groupes communautaires afin d’améliorer le soutien aux victimes (Pratiques exemplaires et protocole d’intervention).

Création d’une table ronde permanente sur la violence faite aux femmes et aux filles afin de conseiller le gouvernement sur les « problèmes actuels et émergents de violence sexospécifiques [attentes sociales concernant les rôles et les comportements propres aux femmes et aux hommes] ».

Abolition du délai de prescription de deux ans pour les crimes à caractère sexuel.

Formation obligatoire pour la première ministre, les ministres et tous les députés gouvernementaux sur la prévention de la violence et du harcèlement à caractère sexuel en milieu de travail.

Mise à jour du programme de santé et d’éducation physique destiné aux élèves du primaire et du secondaire afin de favoriser, dès le plus jeune âge, une compréhension des causes profondes des inégalités de sexe, des relations saines et de la notion de consentement.

Selon le Rapport du groupe de travail sur le respect et l’égalité : mettre fin à la violence sexuelle à l’Université d’Ottawa (2015), les universités doivent miser davantage sur la prévention de la violence sexuelle « au lieu de simplement y réagir »:

Les administrations doivent s’efforcer de décourager une culture qui permet à la violence sexuelle de se produire. Elles doivent investir dans des campagnes actives et continues d’éducation publique qui mettent l’accent sur l’engagement de la communauté universitaire à éliminer la violence sexuelle (Université d’Ottawa, 2015, p. 26).

Le Conseil du statut de la femme recommande :

L’intervention psychosociale, médicale, judiciaire et correctionnelle

L’intervention auprès des victimes d’agression sexuelle

Certaines mesures mises en place dans le Plan d’action 2008-2013 doivent être soulignées. Tout d’abord le Conseil se réjouit de constater que des sommes importantes sont consacrées aux services et aux groupes qui viennent en aide spécifiquement aux femmes et aux filles victimes d’agression sexuelle. Le Conseil tient à rappeler ici l’importance des Centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS) qui, depuis 35 ans, en partenariat avec les groupes de femmes et le milieu communautaire, met son expertise au service de la prévention de la violence faite aux femmes et aux filles, au soutien des victimes et à la défense de leurs droits.

Le Conseil du statut de la femme recommande que l’ensemble des services d’aide et de soutien destinés aux femmes et aux filles victimes de violence, soit reconnu comme étant un élément structurant à inscrire dans une politique gouvernementale en matière de violence faite aux femmes et aux filles.

Dans le Rapport sur la mise en œuvre du plan d’action 2008-2013 en matière d’agression sexuelle, on apprend que depuis l’implantation de la ligne téléphonique sans frais destinée aux victimes d’agression sexuelle, 29 325 appels ont été reçus (entre 2010 et 2014), soit une moyenne de vingt appels par jour. Le Conseil applaudit la mise en place de ce service et sa promotion. Toutefois, il aurait aimé obtenir davantage d’informations concernant son utilisation. Par exemple :

Le Conseil du statut de la femme recommande qu’une évaluation de l’implantation et de la promotion de la ligne téléphonique-ressource soit réalisée en fonction des objectifs visés, des besoins de la clientèle ciblée et de son impact sur les services d’aide et de soutien aux victimes d’agression sexuelle.

L’intervention judiciaire et correctionnelle

Le Conseil reconnaît le travail réalisé par l’appareil policier et judiciaire en matière d’agression sexuelle contre les femmes. Toutefois, le cas de Madame T. à propos duquel la présidente du Conseil est intervenue en février dernier est un exemple de manque de célérité dans l’intervention policière ainsi que du peu de soutien accordé à une victime. Le Conseil croit que les femmes et les filles victimes de violence sexuelle ne sont pas toujours suffisamment écoutées, comprises et surtout crues par certains policiers. L’agression sexuelle demeure aujourd’hui l’un des crimes les moins rapportés aux policiers. Le Conseil croit que la méfiance qu’éprouvent les victimes à l’égard du traitement policer et judiciaire serait l’une des causes de ce sous-signalement. En outre, la lourdeur et la lenteur de l’appareil judiciaire découragent les victimes à porter plainte et à s’engager dans des procédures légales longues et fastidieuses.

Le Conseil du statut de la femme recommande :

Les données policières (MSP, 2013, 2015a) révèlent une augmentation des cas d’agressions sexuelles signalées de nombreuses années après le crime. Selon les centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS), près de la moitié des femmes attendent 13 ans ou plus avant de demander de l’aide à la suite des agressions (CALACS, 2013-2014). Il est donc important que les victimes aient davantage de temps pour intenter une action en justice. Le Québec est une des seules juridictions au Canada où il existe encore un délai de prescription dans le cas d’agressions sexuelles. En 2012, le Conseil du statut de la femme s’est prononcé pour que le Québec abolisse le délai de prescription dans le cas d’agressions sexuelles, à l’instar de la Colombie-Britannique, de la Saskatchewan, du Manitoba, du Nouveau-Brunswick, de l’Ontario, de Terre-Neuve-et-Labrador et des trois territoires canadiens.

Le Conseil du statut de la femme renouvelle la recommandation qu’il avait faite en 2012 à savoir que le délai de prescription soit aboli dans le cas d’agression sexuelle.

Conclusion

Dans les dernières décennies, le Québec a fait des progrès notables pour endiguer les violences faites aux femmes et aux filles. Le Rapport du plan d’action gouvernemental 2008-2013 en matière d’agression sexuelle témoigne de tous les efforts investis dans la prévention, mais aussi dans l’intervention pour soutenir les victimes, pour responsabiliser les agresseurs et pour réduire les risques de récidives. Aussi, beaucoup de travail a été accompli pour assurer des actions cohérentes, complémentaires et concertées entre les différents partenaires concernés par cette problématique.

Mais il reste beaucoup à faire.

Nous avons été secoués, voire surpris il y a quelques mois par l’ampleur de la vague de dénonciations faites sur la place publique par de nombreuses femmes victimes d’agressions sexuelles. Depuis, les remous qui ont agité l’opinion publique se sont peu à peu estompés. Est-ce à dire que notre indignation collective face aux agressions sexuelles et notre mobilisation à les contrer seraient en grande partie tributaires d’évènements révoltants, mais ponctuels, fortement médiatisés ? Le Conseil du statut de la femme espère que non. Cette indignation demeure nécessaire et elle ne devrait pas s’éteindre. Au contraire, elle devrait rester bien présente, au cœur de notre volonté d’agir, tant et aussi longtemps que cette violence dirigée contre les femmes et les filles ne sera pas endiguée.

La violence à l’égard des femmes et des filles demeure un obstacle majeur aux objectifs d’égalité entre les femmes et les hommes. Tant que la société tolérera cette violence contre les femmes et les filles, et qu’elle ne reconnaîtra pas les racines sociales communes qui l’alimentent, peu importe la forme qu’elle peut prendre, nos actions demeureront impuissantes face à son ampleur et sa fréquence.

Le Conseil recommande donc que le gouvernement adopte une vision d’ensemble pour mettre fin aux violences commises contre les femmes et les filles en se dotant d’une Politique gouvernementale de lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles. Le Conseil croit qu’une telle Politique mobiliserait les efforts de tous les partenaires, de manière concertée et cohérente, pour prévenir et contrer toutes les manifestations des violences faites aux femmes et aux filles, notamment la violence sexuelle. Cette Politique devrait d’abord s’appuyer sur une approche préventive inscrite dans les différents milieux de vie, en particulier dans les établissements d’enseignement (du primaire à l’université) auprès des jeunes, filles et garçons, de façon systématique et continue. Aussi, le travail réalisé par les services d’aide et de soutien auprès des victimes de violence devrait être maintenu, encouragé et financé de manière adéquate.

Encore aujourd’hui, trop de femmes hésitent à dénoncer les agressions sexuelles. Parmi les raisons invoquées pour se taire, plusieurs victimes avouent ne pas faire confiance aux organisations poli- cières, ni au système de justice pour les aider et les soutenir. En ce moment, en grande partie à cause des mythes et des croyances qui entourent les agressions sexuelles, le fardeau de dénoncer les violences sexuelles repose presque entièrement sur les épaules des femmes et des filles qui en sont victimes. À cet égard, le Conseil croit qu’il faut travailler d’arrache-pied pour contrer ces mythes et croyances entourant les agressions sexuelles qui perdurent dans les établissements scolaires, les milieux de travail, les médias sociaux et dans la population en générale. En outre, le Conseil souhaite que des améliorations soient faites afin de s’assurer que les victimes d’agression sexuelles soient entendues et crues lorsqu’elles dénoncent et que, par la suite, elles soient soutenues tout au long du processus judiciaire.

Ensuite, le milieu de la recherche devrait être mis à contribution afin d’assurer une plus grande rigueur dans la collecte et l’analyse des données recueillies pour évaluer l’ampleur et la fréquence des violences exercées contre les femmes et aux filles. La recherche doit aussi être sollicitée pour nous permettre d’approfondir nos connaissances et pour évaluer nos pratiques en matière de prévention et d’action pour contrer les agressions sexuelles.

Enfin, la mise en œuvre d’une Politique gouvernementale en matière de violence faite aux femmes et aux filles doit soutenir et aider l’ensemble des Québécoises. Ainsi, des mesures spécifiques destinées aux femmes autochtones et aux autres victimes encore plus vulnérables (les femmes immigrantes ou membres d’une minorité visible, les femmes en situation de handicap, les femmes âgées et les femmes lesbiennes ou bisexuelles) doivent être mises en place et consolidées.

Liste des recommandations

  1. Le Conseil recommande que le gouvernement adopte une vision d’ensemble pour mettre fin aux violences commises contre les femmes et les filles en se dotant d’une Politique gouvernementale de lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles basée sur la valeur fondamentale qu’est l’égalité entre les femmes et les hommes.

  2. Le Conseil du statut de la femme recommande, comme il l’avait fait en 1993, que le gouvernement fasse de la concertation avec tous ses partenaires une véritable priorité en s’appuyant notamment sur l’évaluation des mécanismes de concertation existants. Afin de mesurer les avancées des travaux réalisés au sein des tables de concertation régionales, il apparaît souhaitable pour le Conseil qu’un mandat clair soit donné aux représentants qui y siègent et que des objectifs à atteindre soient encadrés à l’intérieur d’un échéancier à respecter.

  3. Le Conseil recommande de mettre en place des tables de concertation régionales sur la violence faite aux femmes et aux filles qui regrouperaient l’ensemble des formes de violences qui s’exercent contre elles : violence conjugale, agressions sexuelles, cyberviolence, violence en milieu de travail, exploitation sexuelle, violence liée à l’honneur, etc. avec, autour de ces tables, les mêmes représentants quelles que soient les formes de violence abordées.

  4. Le Conseil du statut de la femme préconise de mettre au point des instruments de collecte de données quantitatives et qualitatives sur les différentes formes de violence.

  5. Le Conseil du statut de la femme recommande qu’une campagne gouvernementale de promotion des rapports égalitaires destinée au grand public soit menée et que celle-ci inclue dans son plan de communication des actions concertées en région qui viendraient relayer le message national sur l’égalité.

  6. Dans la perspective d’une approche globale en prévention des agressions sexuelles, le Conseil du statut de la femme recommande que les interventions destinées aux enfants et aux adolescents inspirées des meilleures pratiques s’adressent non seulement aux victimes potentielles, mais également aux agresseurs potentiels.

  7. Le Conseil du statut de la femme recommande que la question de l’implication des hommes et des garçons en matière de violence contre les femmes et les filles fasse l’objet de plus amples réflexions et concertations pour que la prévention de la violence soit portée non seulement par les femmes et par les institutions sociales, mais aussi par les hommes et les garçons eux-mêmes.

  8. Au sujet de l’éducation à la sexualité dans les écoles, le Conseil du statut de la femme recommande :

    • Qu’une consultation élargie soit menée afin de recueillir les différents points de vue sur la question de l’éducation à la sexualité à l’école, issus de plusieurs horizons;

    • Que le programme d’éducation à la sexualité dans les écoles offre de l’espace et des outils aux jeunes, filles et garçons, pour qu’ils puissent s’exprimer sur les enjeux de la sexualité et sur ceux de l’égalité entre les femmes et les hommes.

  9. Le Conseil du statut de la femme recommande :

    • Qu’un inventaire des bonnes pratiques de prévention et d’intervention précoce en matière d’agression sexuelle dans les cégeps et les universités soit réalisé (tel que prévu dans le Plan d’action gouvernemental 2008-2013), qui prendrait en compte ce qui se fait au Québec, mais aussi ailleurs au Canada et aux États-Unis.

    • Qu’à la suite de cet inventaire, un guide de ressources ainsi qu’une politique de prévention des agressions sexuelles, destinés aux cégeps et universités du Québec, soient produits (sur le modèle ontarien) et que soit mis en place un processus de suivi et d’évaluation.

    • Que le gouvernement du Québec accorde les ressources financières nécessaires à la mise en œuvre de ces bonnes pratiques dans les établissements visés.

    • Que ces actions soient incluses dans le prochain Plan d’action gouvernemental en matière d’agression sexuelle.

  10. Le Conseil du statut de la femme recommande que l’ensemble des services d’aide et de soutien destiné aux femmes et aux filles victimes de violence, soit reconnu comme étant un élément structurant à inscrire dans une politique gouvernementale en matière de violence faite aux femmes et aux filles.

  11. Le Conseil du statut de la femme recommande qu’une évaluation de l’implantation et de la promotion de la ligne téléphonique-ressource soit réalisée en fonction des objectifs visés, des besoins de la clientèle ciblée et de son impact sur les services d’aide et de soutien aux victimes d’agression sexuelle.

  12. Le Conseil du statut de la femme recommande :

    • que le processus de plainte soit amélioré et que les organisations policières s’assurent que les droits des victimes sont respectés;

    • que l’appareil judiciaire joue son rôle de soutien plus efficacement auprès des victimes afin de leur éviter des souffrances supplémentaires et inutiles.

  13. Le Conseil du statut de la femme renouvelle la recommandation qu’il avait faite en 2012 à savoir que le délai de prescription soit aboli dans le cas d’agressions sexuelles.

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  1. La Politique d’intervention en matière de violence conjugale élaborée en 1986 par les ministères de la Justice et du Solliciteur général du Québec (aujourd’hui le ministère de la Sécurité publique), vise trois objectifs : humaniser le système de justice; encourager les victimes à porter plaine et leur fournir de l’aide et le soutien dans leurs démarches; contribuer à l’arrêt de la violence en privilégiant des sentences appropriées qui prennent en compte tout autant les besoins des victimes que ceux des agresseurs (Gouvernement du Québec, 1986).
  2. Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes, Résolution 48/104 de l’Assemblée générale du 20 décembre 1993.
  3. Les agressions sexuelles non conjugales sont rarement signalées à la police (Sinha, 2013 : 10).
  4. Les statistiques tirées du Programme DUC 2 (Programme de déclaration uniforme de la criminalité), « sont pertinentes et nous renseignent entre autres sur le nombre de plaintes pour infractions sexuelles, leur traitement et les caractéristiques des victimes et des auteurs présumés, illustrant ainsi en partie l’ampleur et l’évolution de ce type de criminalité au Québec » (MSP, 2015a : 2).
  5. Autres infractions d’ordre sexuel : contacts sexuels, incitation à des contacts sexuels, exploitation sexuelle, inceste, corruption des mœurs d’un enfant, leurre d’un enfant au moyen d’un ordinateur, relations sexuelles anales, bestialité (perpétrer ou forcer une personne), voyeurisme.
  6. Titre de l’avis du Conseil du statut de la femme sur la violence faite aux femmes (1993).
  7. 7 1 088 étudiants ont participé à l’enquête; francophones et anglophones, femmes et hommes.
  8. Actes du forum du 17 novembre 2000, « Les relations amoureuses des jeunes », Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre et le CLSC Olivier-Guimond, 2001.
  9. Les travaux de recherche de Simon Lapierre portent sur les femmes et les enfants qui vivent dans un contexte de violence conjugale et sur l’intervention en matière de violence faite aux femmes.
  10. (https://www.csf.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/commentaires-de-la-presidente-sur-la-chanson-controversee.pdf)
  11. Depuis 2013, à la demande des étudiantes, un service d’aide aux victimes d’agressions sexuelles a été mis sur pied dans les murs de l’université.